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Brett Regali, jeu 07/11/2019 - 20:45

Le hockey suisse est ainsi fait : les grandes manœuvres en vue de la saison suivante commencent au mois de novembre déjà. Les agents et dirigeants profitent de la première pause pour l’équipe nationale qui joue la Deutschland Cup (dont à peu près tout le monde se fout) pour signer des contrats qui entreront en force neuf mois plus tard.

Je ne crois pas détruire vos illusions, chers lecteurs, en vous disant qu’il n’a y aucun gros poisson à espérer de notre côté. On se contentera de regarder les grosses écuries se battre entre elles. On ne fait pas (plus ?) partie de cette élite, un peu par choix mais surtout par contrainte. Nul besoin de vous expliquer pourquoi.

Il y a cependant un dossier majeur qui traîne sur le bureau de la direction sportive : Robert Mayer. Car si on ne peut pas recruter des joueurs dominants, prolonger les nôtres reste dans nos cordes. Sans faire insultes aux autres joueurs en fin de contrat, c’est la seule décision stratégique importante à prendre à l’heure actuelle. Entendez par là que quelque soit l’option choisie (ou subie), un message sera envoyé. En gros, allons-nous faire de Descloux notre gardien numéro 1 ou va-t-il rester le « 1,5 » actuel ?

Dans un monde parfait où le club disposerait d’un budget très confortable, la question ne se poserait pas vraiment. Robert Mayer a ses défauts mais il reste un gardien solide de LNA. Quand on connait l’importance du poste de gardien pour avoir du succès cumulé à la jeunesse de l’effectif, notamment en défense, c’est le choix de la raison. Car confier la cage dès la saison prochaine à un gardien de 24 ans, derrière une défense encore plus jeune, le tout dans un effectif lui aussi peu expérimenté, c’est audacieux !

Loin de moi l’idée de nier le talent de Gauthier Descloux, il a démontré à plusieurs reprises qu’il en avait. Le doute subsiste néanmoins sur sa capacité à évoluer au meilleur niveau durant toute une saison. Jouer 25 matchs est une chose, en jouer 45 plus les séries en est une autre. Le tout, il faut le rappeler, dans un effectif qui n’est pas dominant. Les plus audacieux diront qu’il faut bien faire le pas une fois, et on ne peut pas complètement leur donner tort. D’autant plus quand on voit briller nos jeunes pousses cette saison. Mais le poste de gardien a ça de particulier qu’on ne peut pas simplement lui donner moins de glace quand ça va moins bien en alignant un peu plus les autres joueurs.

Le problème, c’est que justement le club ne dispose pas d’un budget très confortable et cela nous oblige à faire des choix. Robert Mayer vient d’avoir 30 ans, il a donc encore quelques belles saisons à livrer mais il n’a plus sa carrière devant lui. Il n’a donc aucune raison de signer au rabais, d’autant plus que le club ne peut pas lui faire miroiter un potentiel titre à court terme. Alors que des prolongations de contrat ont été accordées à plusieurs pièces importantes et que d’autres vont devoir suivre pour garder nos espoirs, quelle marge budgétaire reste-t-il pour Mayer ?

Le problème risque d’être d’autant plus grand qu’on se dirige vers une certaine pénurie à ce poste à travers la ligue. Le départ à la retraite de Hiller va laisser un grand trou du côté de Bienne dont les bons résultats sont passablement dépendants de ses performances (les chiffres sont limpides). Berne pourrait aussi être sur les rangs malgré des affirmations contraires ces derniers jours. Si les résultats ne décollent pas, des actions devront êtres prises du côté de la capitale où l’on ne connait pas le concept de saison de transition. À Lugano, le contrat de Zurkirchen arrive aussi à échéance et on imagine que Montegazza pourrait ressortir son chéquier pour recruter un meilleur portier.
Ajoutez à ça plusieurs clubs dont la situation devant la cage est potentiellement fragile (Ambri et Rappi notamment) et vous avez l’équation parfaite pour faire monter les enchères à un niveau déraisonnable. Robert Mayer et son agent ne le savent que trop bien.

Mayer a donc la possibilité de décrocher un contrat élevé dans un marché où la demande est forte et l’offre limitée. Boltshauser pourrait être l’autre opportunité à saisir pour les clubs dans le besoin. Cependant, Lausanne joue assez bien le coup en lui offrant beaucoup de temps de jeu dans le but de le garder en plus d’avoir les moyens de lui faire une offre solide.

Le GSHC pourra-t-il s’aligner si le marché s’emballe ? Il y a fort à parier que non. Et en se lançant avec Descloux la saison prochaine on ne plonge pas non plus dans la totale inconnue. D’ailleurs, on ne serait pas le seul club à confier la cage à un jeune gardien et ça se passe plutôt bien du côté de Davos pour l’instant cette saison.

Dans ce cas de figure, il faudra par contre impérativement trouver un numéro 2 assez solide pour lui confier un certains nombre de matchs et ne pas tomber en mode panique en cas de blessure de Descloux. Avec 50 matchs, les doubles journées vendredi-samedi et la coupe de Suisse, la saison est dense. Pratiquement aucun club n’aligne le même gardien 50 soirs. Faire souffler un peu son portier est efficace et d’autant plus important lorsque celui-ci n’a jamais joué plus de 30 parties en une saison jusque là.
Pourquoi ne pas proposer un contrat d’un an à Manzato par exemple ?

Au final, tout est une question de prix. Prolonger notre gardien helvético-tchèque est la solution la plus sécurisante pour que notre équipe se développe dans la sérénité. Néanmoins, consacrer trop d’argent à ce poste (Descloux ne joue pas au SMIC) c’est prendre le risque de ne pas pouvoir prolonger nos meilleurs jeunes éléments par la suite. Une certitude : l’avenir passe bien plus par eux que par Robert Mayer…