Les Aigles brillent comme jamais en supériorité numérique. Grâce au talent des joueurs et à un système ingénieux
Ils marchent sur un fil. La tête droite, le regard levé. La peur du vide, la peur du bide, ils ne connaissent pas. «J’ai des sueurs froides à chaque fois. Il ne faut pas être cardiaque lorsqu’on applique un système de supériorité comme le nôtre. La part de risque est calculée, certes, et elle diminue à mesure que la saison avance. Mais il faut rester vigilants.» Chris McSorley rend hommage aux deux funambules de son power-play, le meilleur de la ligue. «Avec Romain Loeffel et Johan Fransson, nous avons deux chefs d’orchestre qui dirigent chacun à la perfection leur unité spéciale. C’est cette polyvalence qui nous rend spécialement dangereux.»
Deux artistes à la baguette
Depuis le début de la saison, Ge/Servette a transformé le jeu de puissance en jeu de la toute-puissance. A la base de la pyramide, il y a donc ce défenseur unique qui louvoie le long de la ligne bleue. C’est lui qui donne le la. C’est lui qui annihile le pressing adverse d’une feinte de corps ou d’une passe dans le dos. Johan Fransson et Romain Loeffel sont les deux artistes qui ont redonné de la couleur à un power- play qui a longtemps été la risée du pays.
«C’est une vraie satisfaction de contribuer au bon fonctionnement du jeu de puissance, savoure Romain Loeffel. C’est aussi une fierté. Si je suis venu de Fribourg à Genève, c’est aussi parce que je savais qu’ici on me donnerait des responsabilités. Ce que l’on ne faisait plus à Saint-Léonard.» Au moment où la prolongation de contrat du Neuchâtelois est sur le sommet de la pile des dossiers de Chris McSorley, il est à espérer que cette confiance accordée par le staff pèsera dans la réflexion de l’actuel top scorer des Aigles.
C’est donc avec un système à un seul défenseur que Chris McSorley et Louis Matte – «qui travaille encore la vidéo quand les autres, y compris moi-même, dorment déjà», souligne le boss des Vernets – ont trouvé la clé. «Il n’y a pas de véritable secret, développe Romain Loeffel. Les consignes sont finalement assez simples. Nous essayons d’être le plus mobiles possible pour nous créer des situations de deux contre un dans la zone offensive. Le coach nous demande aussi de tirer à une certaine hauteur pour provoquer des rebonds ou des déviations. C’est joli de marquer sur un tir direct dans la lucarne. Mais un but moche comptera tout autant.»
Jeudi soir contre Zurich, c’est Matt D’Agostini qui a retrouvé le sourire et le chemin du but. Il se pose comme le spécialiste de la concrétisation en supériorité numérique. «Nous avons des joueurs techniques adaptés pour ces situations spéciales, apprécie-t-il. Le puck tourne bien et moi j’essaie de tirer quand l’occasion se présente. Parfois ça rentre, parfois pas. Pourquoi? C’est mieux de ne pas y penser.»
Dans le jargon, le geste réalisé par Matt D’Agostini sur le 1-0 et lors de l’égalisation à 2-2 est un one-timer . En français dans le texte, on parlera de tir en première intention. «C’est toujours spectaculaire à voir pour le public, dit Romain Loeffel. C’est vrai que c’est souvent les joueurs étrangers qui font cela car ils ont aussi été engagés pour ça. Mais nous avons aussi d’excellents techniciens suisses qui sont capables de le faire.»
«Du jamais vu»
Une tactique bien huilée, des joueurs habiles et confiants, et cette part de réussite insolente. «J’ai déjà vu dans ma carrière des power play qui tournaient aussi bien que le nôtre, témoigne Matt D’Agostini. Mais je ne jouais pas dedans! Là c’est un réel plaisir d’évoluer avec de tels coéquipiers. Romain et Johan sont comme des quarterbacks, ils créent du jeu.»
A chaque coup de sifflet de l’arbitre pour sanctionner une faute adverse, un frisson parcourt désormais les travées et les bancs des joueurs. «Moi, je suis à chaque fois inquiet quand on reçoit une pénalité, dit Chris McSorley. Alors, oui, j’imagine que nos adversaires ont quelques craintes lorsque c’est nous qui jouons avec un homme de plus.»
«Pour nous, joueurs, l’excitation monte d’un cran lors de chaque pénalité, enchaîne Loeffel. Car on sait que les chances de faire mouche sont grandes.» Avec un taux de réussite de 32% en supériorité numérique, les Aigles font figurent d’épouvantails. Du coup, ce sont les adversaires qui marchent sur un fil et sont comme pris de vertige.
Power-play
A l’affiche Ge/Servette se rend ce soir à Davos (19 h 45).
Absents Bays, Almond, Picard, Vukovic, Traber, Pyatt (blessés) et Wick (suspendu 1 match après sa charge contre Shannon).
Retour Le Bruntrutain Marco Pedretti fait son retour dans l’alignement pour compenser l’absence de Wick. Pas d’autre changement par rapport à l’équipe victorieuse jeudi soir.
Mayer s’installe Sans faire de bruit, Robert Mayer s’installe dans la cage des Aigles. Avec 91,91% d’arrêts (15 matches), il se classe 4e de la ligue.