Privé de Slater, Lombardi et D’Agostini, les Aigles ont livré un morceau de bravoure à Zoug
C’est dur. Mais pouvait-il en être autrement? Miné par les blessures, Ge/Servette a livré un morceau de bravoure à Zoug. Il a joué. Il a frappé. Il a tenu le choc pendant quarante minutes. Mais, exsangue, il a fini par craquer pour rentrer bredouille. Il est parfois des défaites qui peuvent en dire plus que certains succès sur le caractère des joueurs, celle subie à la Bossard Arena est à classer dans cette catégorie. C’est le message transmis par Chris McSorley à ses hommes dans le vestiaire.
Le coach n’a pas eu besoin de faire jouer ses cinq mercenaires à zig zag zoug pour désigner celui qui serait surnuméraire hier soir. C’est que la journée avait bien mal commencé pour Ge/Servette. A l’issue du traditionnel warm-up matinal, c’est un Louis Matte à l’humeur cassante qui rejoint son petit bureau. Des soucis pour l’assistant de Chris McSorley et du travail plein les bras pour le médecin.
Quand il n’y en a plus…
Au forfait d’Arnaud Jacquemet (nuque) s’est ajouté celui de Matt D’Agostini. Il s’est blessé tout seul dans le bas du corps lors de l’échauffement. Forfait. Le top scorer des Aigles ne grimpera même pas dans le car. Il a passé hier une IRM. Ce serait moins grave qu’on aurait pu le craindre. Ouf! Matthew Lombardi? Ecarté depuis trois matches, le Canadien a mal au dos. Il jettera l’éponge à l’issue de l’échauffement à la Bossard Arena. Dernier coup dur? Non.
Quand il n’y en a plus, il y en a encore. Dès les premières minutes de jeu, on comprend que Jim Slater, lui aussi, a renoncé à la dernière minute. Renseignement pris, il souffre de douleurs à la tête. Sans doute des suites de sa commotion spectaculaire subie il y a un peu plus de deux semaines à Berne. C’était avant cette rencontre que Chris McSorley pouvait se réjouir d’avoir des problèmes de riche en laissant Matthew Lombardi en tribune. «Tous les clubs aimeraient avoir mes soucis.» Trois semaines plus tard, l’Ontarien ne rit plus vraiment. Avec deux étrangers valides, sans ce Jim Slater qui a transformé la citrouille grenat en carrosse rutilant depuis son arrivée à Genève, que pouvait-il espérer?
Ce duel entre le 2e et le 3e du classement a pourtant été de bonne facture malgré l’hécatombe qui a plombé l’ambiance dans le vestiaire des Aigles. Il n’y avait pas mille et une façons de jouer le coup contre l’armada offensive emmenée par Pierre-Marc Bouchard. Le meilleur compteur du championnat est resté muet, une fois n’est pas coutume, mais quel régal permanent pour les yeux des amateurs de beau jeu. La classe et l’esprit réunis. Malgré les prouesses de leur leader offensif, Zoug s’est longtemps cassé les dents sur des Genevois plus solidaires que jamais et qui ont joué à la perfection pendant quarante minutes.
Tout l’édifice a longtemps reposé sur Robert Mayer. Joueur, concentré, le gardien des Aigles, sur son art perché, a sorti le grand jeu. «Il a été énorme», a dit Timothy Kast de retour au jeu. Devant lui, ses coéquipiers se sont donc mis au diapason. A chaque récupération de puck, les visiteurs ont joué chaque coup à fond. Rien à redire donc, après deux tiers, si le visiteur virait en tête grâce à un but en supériorité numérique d’un Jeremy Wick omniprésent. Frappeur et buteur, le Canado-Suisse confirme qu’il a franchi plus qu’un échelon cette saison. Il a illustré à merveille l’état d’esprit de ce Ge/Servette qui n’avancera pas la carte des absents pour expliquer son coup de mou dans le final. Et pourtant…
Zig, zag, zoug…
Zoug ne joue pas le haut du tableau par hasard. Tobias Stephan reste Tobias Stephan. Les Genevois, qui l’ont côtoyé au quotidien pendant cinq saisons du côté des Vernets, connaissent l’oiseau et les trésors d’inventions dont il faut faire preuve pour allumer la lampe rouge dans son dos. C’est au final la profondeur de l’effectif des hommes d’Harold Kreis qui a pesé lourd. Dans un match aussi tendu, et serré, un petit manque de fraî- cheur dans les rangs genevois a sans doute provoqué certaines erreurs. On pense surtout à ce puck mal maîtrisé de la main par un Goran Bezina par ailleurs irréprochable et qui a débouché sur le but décisif de Dario Buergler.
Le verdict est cruel tant les hommes de Chris McSorley ont évolué avec détermination. Tom Pyatt, qui a joué comme deux mercenaires hier, n’a-t-il pas échoué d’un rien à l’ultime seconde? Un point, au moins, n’aurait pas fait de mal pour recharger les batteries et recevoir ce soir un Lugano qui a déroulé chez lui contre Langnau. Ce match contre un autre membre du top 5 s’annonce une nouvelle fois bien délicat. Avant de s’engouffrer dans le car, tant Chris McSorley que Louis Matte n’avait que peu d’espoir d’organiser une partie de zig, zag, zoug pour désigner l’étranger surnuméraire.