Battu par Fribourg, Ge/Servette ne fait pas rêver les foules dans un début de saison très poussif. Le temps fera-t-il l’affaire?
On pourrait tirer sur l’ambulance. Vociférer comme le plus versatile des supporters. C’est vrai ça, le cochon de payant veut en voir et en avoir pour son argent. C’est dire que pour l’instant, il ne trouve pas ça marrant, des Aigles transparents. Contre un leader confiant, défiant – pour l’instant – les pronostics les plus sombres, Ge/Servette n’a pas plu autant qu’il n’a pas pu.
Au coup de sirène final, les spectateurs ont pourtant quitté l’arène presque sans broncher. Pas de colère. Pas de tristesse non plus. Comme une sorte d’indifférence. Symbolisée par une affluence (5823 spectateurs) qui dit tout le travail que le club doit encore effectuer pour reconquérir les cœurs. Avant même de poser la première pierre de la nouvelle patinoire du Trèfle-Blanc, il faudrait peut-être commencer par remplir à nouveau l’antique enceinte qui sonne de plus en plus creux.
L’ombre de Chris McSorley
Une longue, belle, tumultueuse histoire s’est achevée ce printemps avec le départ de Chris McSorley. Remplacé à la bande par Craig Woodcroft, le plus Genevois des Ontariens est désormais relégué dans l’ombre. Que les nostalgiques de «Jésus Chris» ne se bercent pas d’illusions, l’ancien homme fort des Vernets ne reviendra pas à la bande. Ce n’est certainement pas le projet des nouveaux dirigeants, Mike Gillis en tête. Et ce n’est certainement pas dans ses intentions.
Chris McSorley n’a pas oublié que lorsqu’il a débarqué en Suisse, il avait eu besoin de temps. Il faut donc en laisser à Craig Woodcroft pour imposer sa patte. Il faut aussi que le public fasse son deuil. Sur le banc, un homme impassible a remplacé un homme irascible. Un pot de fleurs pour un pot de fer… Le nouvel entraîneur des Aigles n’est pas du genre à tenter des coups de poker. Il estime qu’un match se gagne essentiellement lorsqu’on le prépare. Il n’hésite pas à pointer du doigt la responsabilité de ses joueurs. Et la sienne? «Nous faisons tous partie de l’équipe et nous cherchons les meilleures solutions pour gagner.»
Un peu dépité par ce revers sévère au vu de la physionomie de la rencontre (43 tirs à 19 pour Ge/Servette), Craig Woodcroft commence gentiment à mettre un peu d’eau dans son verre de bière. Non, on ne change pas d’un coup de baguette magique la philosophie d’un club. Non, on n’impose pas un changement de système radical sans subir quelques ratés à l’allumage. Certains joueurs n’ont connu qu’une seule voie à suivre depuis des années aux Vernets. Une voie express, simpliste. Une voie faite de longs pucks en avant, de coups de patin et d’épaule pour s’imposer.
«C’est un long processus»
En un été tout a été bouleversé. Il a fallu oublier les vieux réflexes. Désormais, l’Aigle est sommé de réfléchir. Il doit lever la tête, utiliser l’espace et manier l’art de la première passe. Dans un contexte si particulier, il aurait été étonnant que tout cela se fasse sans casse. «C’est un long processus, reconnaît Craig Woodcroft. Mais j’estime que nous sommes sur le bon chemin. Il y a encore plein de petites choses qui doivent se mettre en place. Contre Fribourg, nous avons été bons pendant deux périodes. Nous avons déployé l’énergie pour être en mesure de gagner. Ce n’était pas forcément le cas la veille à Langnau.»
Inconsistant, pour ne pas dire inexistant lorsqu’il joue à l’extérieur, Ge/Servette a tout de même montré un autre visage à domicile (deux victoires contre Lausanne et Berne avant le revers de samedi). A force de jouer les intermittents du spectacle, l’Aigle bat de l’aile. Pas de doute, la lune de miel avec Craig Woodcroft est terminée. «La saison est longue», sert-on aux inquiets. On a surtout envie de rappeler à certains, sans les nommer, que la saison a juste commencé…
On ne tire pas sur une ambulance. Pas encore.
Qui pour marquer?
Il n’y a que Kloten qui a fait pire. Avec 15 buts marqués en sept matches, Ge/Servette possède la deuxième plus mauvaise attaque de LNA. Et si c’était aussi le fruit d’un déséquilibre? D’un côté de la balance, une ribambelle d’occasions. De l’autre, presque personne pour les concrétiser. Ge/Servette manque cruellement de buteur. Ceux que l’on ose appeler les snipers du championnat. A Fribourg, il a suffi d’un décalage à Julien Sprunger pour inscrire le 3-1 d’un maître tir en première intention. Qui est capable de faire cela à Genève? Qui peut, sans faire sourire, envisager d’atteindre la barre des vingt buts en une saison? Dans l’effectif actuel des Aigles, un seul joueur a été capable d’atteindre ce total par le passé: c’est Juraj Simek lors de la saison 2012-2013 avec Genève. L’homme est devenu plus altruiste comme en témoigne son bon début de saison (1 but 4 passes). En fait, seul six attaquants (Almond, Gerbe, Romy, Simek, Rubin et Spaling) du contingent 2017-2018 ont une fois au moins atteint la barre des dix buts en saison régulière. C’est peu, trop sans doute. Du côté des défenseurs, trois hommes ont atteint ou dépassé ce total. Goran Bezina (13) qui n’a plus vingt ans. Romain Loeffel (10) et Arnaud Jacquemet. Alors que faire: se réveiller ou rééquilibrer le contingent?