Les deux lutins pourraient bien détenir la clé de ce quart de finale. Premier duel ce samedi à Zoug, avec des Aigles ambitieux
Et si, finalement, après cinquante matches de championnat, tout se jouait dans un mouchoir de poche, sur un tout petit détail?
Et si Ge/Servette, qui a terminé la saison régulière au sixième rang, avec plus de vingt points de retard sur la tête, devenait champion de Suisse?
Pourquoi, à l’instar de Berne il y a douze mois, les Genevois, qui se sont aussi traînés toute la saison aux alentours de la barre, ne réussiraient-ils pas ce même exploit?
C’est dans tous les cas avec cet état d’esprit de vainqueurs et ces rêves de grandeur que les Aigles se sont envolés vendredi pour Zoug, dans l’antre du troisième, pour ce premier match des quarts de finale des play-off, qui s’annonce très indécis.
Parce que ces Grenat-là, qui ont récupéré Kevin Romy (longtemps blessé), qui ont recruté Francis Paré et Goran Bezina à Zagreb, arrivent dans ces parties spéciales avec le mors aux dents et le vent dans le dos, aussi redoutables que les Ours de la capitale l’an passé. Parce que Chris McSorley, qui n’a pas son pareil pour que la rondelle fasse son printemps, n’a jamais eu autant de choix avant d’aborder ce sprint final.
Mais aussi parce que le coach dispose dans son contingent, avec Nathan Gerbe, d’un homme d’exception. Petit par la taille, immense par le talent, c’est ce joueur qu’il voulait absolument depuis si longtemps. Avec 28 points en 26 matches, l’ex-attaquant de poche des Carolina Hurricanes et des Buffalo Sabres s’est montré à la hauteur des attentes de son employeur. Dans ce monde de brutes, ce lutin de 165 cm est hors norme, c’est un géant.
«Il est unique au monde»
«Il est unique au monde, il n’y a rien à changer. Il est comme une tornade dans une boîte», s’exclame son entraîneur, si heureux de pouvoir compter sur ce véritable lion en cage. «J’ai le feu qui bout en moi», confirme l’Américain, prêt à élever encore d’un cran son niveau. «S’il faut mettre une mise en échec, marquer ou mettre en avant un coéquipier, je suis prêt!» sourit le petit joyau des Vernets, bien décidé à pousser Timo Helbling, Johan Morant et l’arrière-garde zougoise dans leurs derniers retranchements. Mais comment arrêter une telle fusée quand on est défenseur?
Antonietti s’en méfie
«Vu qu’ils sont tout petits, ils arrivent facilement à baisser leur centre de gravité si bas que nous, les grands, on est vraiment embêtés, répond le géant Eliot Antonietti, 196 cm sous la toise. Les petits joueurs comme lui ont des changements de direction que nous n’aurons jamais. Pour les contenir, on ne doit surtout pas se lancer, et les laisser à l’extérieur, même s’ils sont proches de nous.»
Le grand barbu servettien, souvent mis dans le vent par Gerbe à l’entraînement, va se retrouver en face de Lino Martschini ce samedi, qui, avec son mètre soixante-huit, est tout aussi embêtant à contrer que l’Américain. Cinquième buteur de LNA, le top scorer lucernois (49 points en 50 matches) évite lui aussi les rudes attaques des défenseurs par son agilité et sa rapidité. Son tir est souvent infaillible. «Lino, en plus d’être rapide et technique, est très intelligent sur la glace, poursuit le No 47 des Aigles. C’est très difficile de lui mettre un check, il voit vraiment tout autour de lui. Si on peut le comparer à Nathan, lui peut davantage développer son jeu offensif, il peut faire tourner un match à lui seul. A nous de le maîtriser.»
Il n’empêche que l’autre petit génie de LNA n’a jamais vraiment brillé contre les Grenat cette saison (1 but et 2 assists lors des quatre confrontations). Autre statistique en faveur des Aigles: le Lucernois n’a inscrit qu’un seul but lors de ses derniers 10 matches de play-off. Lorsque l’étau se resserre, difficile pour lui de trouver des espaces. Après Davos et Lugano, qui lui avaient rendu la vie difficile, les Genevois ne lui feront aucun cadeau! «Je m’attends à tout: à de l’intimidation, à des provocations, mais en fin de compte, je devrais être performant», a déclaré Martschini au Matin.
«C’est un chien affamé»
«Il n’est pas grand, lui non plus, mais il trouve toujours le moyen de se mettre en avant», prévient Nathan Gerbe, qui compte bien, toutefois, le dominer dans cette série. «Sur la glace, Nathan joue comme un grand et on est très chanceux de posséder un tel joueur, renchérit Francis Paré. Sur la glace, c’est un chien affamé. Beaucoup de joueurs devraient s’inspirer de lui. Je suis content d’être à ses côtés et pas en face de lui. Avec son talent, il devrait évoluer en NHL, tant mieux pour nous!»
Nathan Gerbe et Lino Martschini pourraient bien être les deux grandes attractions de ce quart de finale et la clé d’un premier tour qui risque bien de se jouer sur un petit détail…
Slater, coup de poker ou coup de folie?
Il faudra sans doute attendre que les deux équipes fassent leur entrée samedi soir sur la glace de la Bossard Arena pour avoir une idée exacte de l’alignement. En play-off, les coaches adorent réserver des surprises de dernière minute. Ce sera sans doute le cas en ce qui concerne le choix des quatre joueurs étrangers de Ge/Servette. Rappelons que dans ce domaine, il y a abondance de biens chez les Aigles.
Chris McSorley a cinq véritables atouts (le défenseur Ehrhardt est là pour dépanner en cas d’hécatombe en défense). Il devra en laisser un dans les tribunes. Vendredi, juste avant de grimper dans le car, le coach de Ge/Servette nous annonçait que Jim Slater serait bien le capitaine lors de cet acte I des quarts de finale. «Je suis très satisfait de ses performances lors des deux derniers matches de la saison, a-t-il poursuivi. C’est le genre de match dans lequel il doit être utile.» Un peu à la surprise générale, c’est Francis Paré qui fera les frais de ce choix détonnant. Il faut sans doute voir dans cette titularisation de Slater une volonté d’aller chatouiller certains leaders alémaniques. A commencer par Tobias Stephan. Il est certain que l’ancien gardien des Aigles recevra souvent la visite de l’Américain dans son territoire. Il y aura aussi de la friture avec Johann Morant et Timo Helbling, les deux gorilles chargés de nettoyer la «maison» de leur gardien. Il n’en reste pas moins que l’éviction de Francis Paré suscite bien des interrogations. Depuis son arrivée, à la fin de janvier, le Québécois est décisif sur le plan offensif. En 8 matches, il a inscrit 5 buts et réalisé 6 assists. C’est surtout dans les phases de power play que l’ancien joueur de Zagreb a été efficace, inscrivant 3 buts en supériorité numérique. Seuls Nick Spaling et Romain Loeffel ont fait mieux, avec 4 buts, mais en respectivement 41 et 50 matches!
Alors, coup de poker, coup de folie ou coup de bluff de Chris McSorley?
Il sourit. «Tous nos joueurs étrangers seront impliqués dans cette série, argue Chris McSorley. Les play-off sont un long chemin et chacun comprend qu’il aura un rôle décisif à jouer.» (Grégoire Surdez)
Power-play
L’affiche Acte I des quarts de finale des play-off: Ge/Servette joue samedi soir à Zoug (19.45).
Infirmerie Tim Kast (genou) a terminé sa saison. Floran Douay (pied cassé) est tout de même du voyage à Zoug. Il est toutefois plus vraisemblable qu’il revienne au jeu la semaine prochaine.
Confrontations de la saison:
08.10. Genève-Zoug 1-2
19.11. Zoug - Genève 5-1
20.12. Genève - Zoug 1-2
02.01. Zoug - Genève 3-2 ap
04.01. Genève-Zoug (Coupe) 3-2
Confrontations en play-off
Saison 2004-2005
Quart de finale: 4-0 pour Zoug
Saison 2009-2010
Demi-finale: 4-2 pour Ge/Servette
Saison 2010-2011
Quart de finale: 4-2 pour Zoug
Avantage Kreis L’entraîneur de Zoug, Harold Kreis, a déjà battu Chris McSorley en play-off: c’était en finale en 2008, avec Zurich (4-2 dans la série). G.SZ