12 octobre 2015

L’Aigle joue enfin avec ses qualités et conclut le premier tour en rendant une très bonne copie

 

Page 1 du manuel du hockeyeur genevois. «Ton adversaire proprement tu frapperas et aux foudres de l’arbitre tu échapperas.» Deuxième et dernière page. «La page 1 tu appliqueras, la rencontre tu gagneras.» Bienvenue dans le petit monde de Chris McSorley. Heureux comme un chef, le boss des Vernets a retrouvé une équipe disciplinée, solide, vive. «Dans le premier tiers-temps, nous ne devons pas être loin d’une sorte de record en matière de mise en échec. Ce jeu physique fait partie de notre ADN.»

 

Vendredi soir à Kloten, les Aigles avaient tiré, tiré et tiré sur la cage adverse. Ils avaient patiné tant et plus. En vain. «Loin d’être fâché, j’ai dit aux joueurs qu’en évoluant de la sorte nous gagnerons beaucoup plus de matches que nous n’en perdrons. Cela s’est vérifié contre Berne.» Après un succès très convaincant (4-0) à Zurich, il y a dix jours, Ge/Servette tient désormais son match référence à domicile contre la plus grosse cylindrée du championnat.

 

Une victime de choix

 

Berne, c’est le plus gros budget, la plus grande patinoire, le plus beau contingent. Berne, c’est l’équipe qui engage Derek Roy, un véritable crack de NHL (pas qualifié samedi soir) quand il en a l’occasion, et sans forcément devoir compter sur la bienveillance et la générosité de donateurs anonymes. «Il y a toujours une saveur particulière à battre cette équipe, sourit Chris McSorley. C’est un peu notre Goliath préféré.»

 

Pour le public, Berne est aussi une victime de choix. L’arrogance souvent affichée par le club de la capitale a le don de chauffer l’esprit frondeur et râleur du spectateur genevois. Les Vernets ont aimé la débauche d’énergie des Aigles. Au rayon des costauds, il faut accorder une mention particulière à la classe biberon de Chris McSorley: Floran Douay, Noah Rod et Damien Riat n’ont peur de rien. Jeremy Wick, qui avait marqué les esprits la saison passée en mettant des «mines» à tout va, a enfin envoyé du lourd. Même Goran Bezina semble avoir retrouvé l’impact de ses jeunes années lorsqu’il s’agit d’imprimer un adversaire contre le plexiglas.

 

Il ne faudrait pas résumer la performance des Aigles au seul aspect physique. Mais après une ronde complète de championnat, le vestiaire constate que sans impact, l’équipe ne parvient pas à déployer ses ailes. «Je l’avais déjà dit à Zurich, souligne Noah Rod, quand nous jouons notre jeu, peu d’équipes peuvent nous battre.»

 

A dix-neuf ans, le No 96 entre lentement mais sûrement dans une autre dimension. Sa production offensive prend l’ascenseur. «L’an passé, on m’avait clairement fixé comme objectif de progresser sur le plan défensif. Cette saison, je dois garder cela tout en prenant davantage de responsabilités offensives.»

 

A Genève, le nombre d’années importe peu. Qu’on ait 20 ans, qu’on soit «grand-père», quand on est bon, on est bon. «Chris nous fait confiance et nous aligne en power play avec Damien Riat, poursuit Noah Rod. C’est une belle reconnaissance. D’autres clubs le font aussi. Mais il faut lui donner ce crédit et s’en montrer digne.»

 

Puisque le premier quart de la saison régulière est passé, la photo de l’instant ne dit pas encore si la saison des Aigles (7es) sera colorée ou noire et blanche. Au chapitre des grosses satisfactions, Johan Fransson émerge. La classe du Suédois est accompagnée d’une belle solidité. C’est un peu moins le cas pour Romain Loeffel, brillant vers l’avant, un peu moins dans l’autre sens (–6 de bilan plus minus). Un autre aspect séduit Chris McSorley: c’est l’émergence des jeunes qui masquent un manque de présence des leaders présumés.

 

Certains leaders absents

 

Pour l’instant, Damien Riat, Noah Rod prennent leurs responsabilités. Marco Pedretti profite de chaque faillite individuelle (Rubin samedi soir) pour se mettre en évidence. Gautier Descloux marque des points dans tous les sens du terme. Tout cela masque les copies insuffisantes rendues par les autres (Mayer, Romy, Mercier, D’Agostini). Pourtant, le hockey selon McSorley, ce n’est pas non plus la mer à boire. La méthode ne comporte que deux pages et semble très efficace. Quand elle est appliquée… 

 

Marco Pedretti, l’opportuniste

 

C’est un intermittent du hockey. Engagé au mois par Ge/Servette, Marco Pedretti profite de chaque minute de glace qui lui est offerte. Samedi soir, il a très vite pris la place de Daniel Rubin. Coupable d’une perte de puck en zone neutre sur le 0-1 signé Alain Berger, le mauvais élève a été envoyé au fond de la classe, près du radiateur. Excepté deux présences en power play, le Bernois des Vernets a regardé ses coéquipiers dominer les Bernois de Berne. Il a surtout vu Marco Pedretti se fondre dans le moule. «C’est comme à Zurich, je saute sur chaque occasion pour montrer que je mérite ma place dans cette équipe, dit le Bruntrutain. A Kloten, j’étais 13e attaquant. Même chose ce soir au coup d’envoi. Et d’un coup il faut y aller. Je n’ai donc pas le temps de me poser des questions.» Auteur d’un but important (le 3-1), le Jurassien travaille dans la bonne direction pour achever de convaincre ses coaches. Son contrat court jusqu’à la fin du mois de novembre. «J’ai trop pensé à ma situation au début, dit-il, et cela m’a sans doute crispé.»