La saison a livré son verdict. Genève (6e) affrontera dès samedi le club de Suisse centrale (3e) en quart de finale (best of 7). Un duel bien plus équilibré sur la glace que sur le papier
Pas de doute. Ou alors si peu. Ge/Servette est prêt. Prêt à en découdre. Prêt à plonger dans l’enfer des play-off. Cette «autre saison qui commence», comme ils disent, et qui a le pouvoir magique de faire oublier que le championnat régulier ressemble trop souvent à une litanie. A l’issue d’un dernier week-end sous haute tension, les Aigles ont dû attendre le coup de sirène de tous les autres matches pour connaître le nom de leur adversaire. Battu par Kloten, Ge/Servette aurait pu basculer jusqu’à la 8e place. Finalement, cette défaite rageante est sans conséquence comptable puisque le club des Vernets a conservé sa 6e place. C’est donc Zoug, 3e du championnat, qui est le premier obstacle se dressant sur le chemin qui mène au titre de champion de Suisse.
Lorsque les séries finales approchent, il est de bon ton de nourrir son verbe d’une bonne dose de bois. Il ne faut surtout pas donner à l’autre des raisons de nous détester encore plus. «En play-off, pas besoin de chercher de la motivation, dit Kevin Romy, un habitué de ces matches «à la vie, à la mort». On se prépare toute la saison pour vivre ces moments-là. Et on sait que, dans chaque équipe, chaque joueur sera prêt à donner ces quelques pour-cent de plus qui font la différence. En tous les cas, de notre côté, je peux affirmer que nous le serons.»
McSorley dans son élément
A l’heure de l’analyse des forces en présence, il ne devrait pas y avoir photo. Zoug, c’est du lourd. Du très lourd. Dans le camp genevois, chaque mot est donc pesé. Chaque phrase doit trouver sa cible. C’est ainsi que Chris McSorley, qui excelle encore plus dans l’art verbal lors des play-off, ne souhaite pas que ses ouailles nourrissent le moindre complexe. L’adversaire a beau posséder la troisième défense du championnat et la quatrième attaque, il estime «que Zoug devra sortir lui aussi le grand jeu pour venir à bout de son équipe. Nous avons connu une saison aux antipodes. Tandis que les Zougois ont été très réguliers et ont été épargnés par les blessures, nous, nous avons collectionné les coups durs et les absences de joueurs majeurs.»
En lisant entre les lignes, le coach estime que, d’un côté, il y a une équipe qui n’a pas vraiment souffert pour y arriver. Et de l’autre, un outsider qui a dû se faire mal, trouver des solutions et ne pas sombrer dans un contexte sportif compliqué. Pour ne rien arranger à la saison délicate vécue par les Aigles, on n’oubliera pas de rappeler les nombreuses tensions qui sont apparues au grand jour au niveau administratif. En voyant le sourire de Chris McSorley, malgré cette ultime défaite, on ne peut que penser qu’il reflète autant le soulagement que la fierté d’en être arrivé là dans un tel contexte.
Car on le répète, Ge/Servette est prêt. Il peut regarder son adversaire des quarts de finale droit dans les yeux. Et ensuite? Si Berne et Zurich semblent au-dessus du lot, une dynamique positive issue d’une qualification peut transcender une équipe. Mais avant de rêver, chacun se concentre sur le prochain match. Le seul qui compte en play-off où la victoire vaut un point. Le but: être le premier à 4. Tout le reste est à mettre de côté. «On parle souvent d’émotions, dit Goran Bezina. Et c’est vrai qu’il ne faut jamais tomber dans l’excès après un match. Ne pas s’enflammer après une victoire. Ne pas s’écrouler ni renoncer après une défaite.»
Blessures et suspensions
L’ancien capitaine des Aigles qui est revenu au club depuis trois semaines a remis son costume de leader. «C’est une série très ouverte selon moi, dit-il. Ils sont un peu moins bien sur cette fin de saison tandis que nous, nous sommes en phase ascendante. Il faudra jouer là-dessus. En ce sens, le premier match à Zoug aura toute son importance. Il faudra leur montrer nos intentions. Leur faire comprendre que nous serons bien présents dans cette série.» Le défenseur emblématique des Vernets (douze saisons complètes avant de revenir le 31 janvier) a toujours dit qu’il rêvait de gagner un titre avec Genève. Cette année pourrait-elle être la bonne?
«C’est notre intention. C’est toujours notre intention. Après, je pense que nous n’avons jamais eu autant de profondeur dans notre effectif que cette saison. Et ça, ça peut vraiment faire la différence.» Il faut se souvenir que lors des trois derniers championnats, les Aigles ont échoué au stade des demi-finales. Et à chaque fois, c’est ce manque de profondeur qui avait constitué la cause principale de l’échec. Idem lors des deux finales de 2008 et 2010. Entre les blessures et les suspensions, Genève n’avait pas autant de cartes de rechange que ses adversaires.
Une cage pour Nathan Gerbe
Cette fois la donne semble bel et bien différente. Ge/Servette se présente face à Zoug avec une équipe presque au complet. Seuls Tim Kast (touché samedi soir) et Floran Douay (qui a reçu un puck sur un pied vendredi à Berne) sont à l’infirmerie. Pour le reste, tout le monde est en santé et impatient. «Zoug a un bilan de six défaites lors des 8 derniers matches, sourit Chris McSorley. J’espère que ce bilan passera à 10 défaites sur les 12 derniers matches!» Pour passer de la boutade à l’acte, Chris McSorley annonce qu’il pourra compter sur Nathan Gerbe. Ménagé ce week-end, l’explosif ailier américain piaffe. «Il n’en peut plus d’attendre, dit le coach. Il est intenable. Je me demande si je ne vais pas acheter une cage pour le contrôler jusqu’à samedi et protéger la population!»
Chris McSorley aussi est prêt, pas de doute…
L’essentiel
L’avis du coach Chris McSorley estime que Zoug a connu une saison très, trop, tranquille pour bien préparer les play-off.
Le contingent Jamais Ge/Servette n’a eu autant de bons joueurs valides à sa disposition au moment d’aborder les quarts de finale. C’est un vrai bonus.
L’adversaire Mélange de talent et de rugosité, les Zougois ont terminé la saison en pente douce. Mais ils pourront toujours compter sur un gardien d’exception.
Zoug, c’est aussi: le bon Stephan, l’artiste Martschini et la brute Morant
Tobias Stephan (gardien) Il a quitté Genève en 2015 mais l’ancien gardien des Aigles est entré dans le cœur des fans des Vernets. Sa gentillesse, teintée de réserve, hors de la glace, détonne avec la pile électrique qu’il peut parfois être pendant un match. Depuis son retour en Suisse (à Genève en 2009), il fait partie des trois meilleurs gardiens du pays (2e cette saison derrière Genoni de Berne). La question: Genève et son entraîneur des gardiens, Sébastien Beaulieu, le connaissent par cœur. De quoi en profiter? Les Aigles pensent que oui.
Lino Martschini (attaquant) Il a beau être le deuxième plus petit (1,68 m) joueur du championnat, juste derrière le Servettien Nathan Gerbe (1,65 m), Lino Martschini est l’un des grands artistes du championnat. Formé à Zoug, cet ailier de poche possède un coup de patin ravageur et un sens du but aiguisé. En supériorité numérique, positionné à la ligne bleue, il use à merveille de son tir direct puissant et précis. Martschini, cette saison, c’est 49 points en 50 matches. Seul joueur suisse à avoir fait mieux: Julien Sprunger. Attention danger!
Johann Morant (défenseur) Que dire? Ses détracteurs les plus virulents estiment que sa place est davantage dans une cage de MMA que sur la glace. Nous ne sommes pas loin de partager cet avis. En 2012, le défenseur français à licence suisse avait écopé de 14 matches de suspension pour avoir frappé un adversaire à la tête contre la bande dans un premier temps, puis continué son œuvre au sol, et par-derrière s’il vous plaît. A Genève, l’homme le plus pénalisé de LNA la saison passée ne fait peur à personne. «On saura s’en occuper s’il le faut», dit Goran Bezina.