La période estivale est loin d’être une partie de plaisir pour l’attaquant de Genève-Servette
Noah Rod vit un été en enfer. Mais quelle est sa motivation première? Progresser, devenir un pilier de Ge/Servette et tutoyer les sommets, évidemment. Mais pour se faire une place durable dans l’élite du hockey sur glace, il faut consentir à beaucoup de sacrifices. Cela passe par une préparation physique estivale durant laquelle le corps et l’esprit de l’attaquant de 19 ans sont poussés à l’extrême, jusque dans leurs derniers retranchements. A un train d’enfer. Tel est le quotidien de Noah Rod, confiné avec ses coéquipiers des Aigles plusieurs fois par jour dans les entrailles des Vernets où, en juin et en juillet, l’air est très vite irrespirable et la chaleur suffocante. Bienvenue dans l’enfer de la salle de musculation. «C’est la partie dégueulasse de la vie d’un athlète de haut niveau.» Mathieu Degrange n’a pas peur des mots. Le préparateur physique de Ge/Servette sait que son jeune attaquant et le reste de l’effectif grenat doivent passer par là s’ils entendent réussir une saison pleine lors du prochain exercice.
Au début du mois d’avril, Noah Rod s’est-il tout juste permis une petite escapade de treize jours en Thaïlande, en compagnie de son amie Karen. Sur place, il a pris le temps d’ancrer à vie et au bambou un tatouage – deux tigres – sur son flanc droit. «Pendant 48 heures, j’en ai bavé comme jamais…» Même en vacances, le jeune homme ne fait pas de cadeau à son corps. L’enfer. Aujourd’hui, son voyage du côté de Ban Khuk Khak étant déjà un lointain souvenir, il vient d’entamer sa onzième semaine de préparation.
«Je commence à trouver le temps long, grimace le No 96. C’est rude, car on sait qu’on ne marquera jamais un but depuis la salle de muscu (rires) . Mais c’est un passage obligé. Mathieu a mis sur pied depuis plusieurs années un système de modules d’exercices et le but est que chaque joueur de l’équipe travaille de façon autonome. Et ce, tout en gardant cet esprit d’équipe puisque nous nous côtoyons au quotidien. Il y a deux entraînements par jour: un le matin et un en fin d’après-midi. Chaque séance dure environ 90 minutes et il n’y a pas de pause durant ce laps de temps…»
«Cette année, la préparation a été intensifiée, enchaîne Mathieu Degrange. Car même si le championnat ne reprend qu’au début du mois de septembre, Noah et les gars doivent être prêts à disputer les rencontres de Ligue des champions, qui débutent en août.» Et pour mettre toutes ses chances de son côté et aligner les bons résultats, le GSHC a fait l’acquisition d’une machine quasiment unique en Suisse: «C’est un engin qui permet de calculer la puissance dégagée par les gars, poursuit le préparateur physique. Le but est d’enchaîner une série d’exercices à plusieurs reprises et de délivrer si possible toujours la même puissance après des efforts répétés. Le seul autre club dans notre pays à posséder une telle machine est le FC Bâle. On peut aussi en trouver une à Macolin.»
Cette préparation estivale, aussi dure soit-elle, va déterminer et conditionner toute la saison à venir. D’ailleurs, pendant les deux premiers mois, les hockeyeurs n’ont aucun contact avec la glace. A la place, un revêtement spécial qui permet de pratiquer le roller inline a été posé aux Vernets. «De l’extérieur, on ne se rend pas compte à quel point les joueurs souffrent, souligne Mathieu Degrange. Sur cette piste plastifiée, ils disputent des rencontres dans des conditions similaires à celles d’un match de LNA mais sans changement de ligne. Ce sont des parties qui se déroulent à 5 contre 5 durant trois tiers-temps de vingt minutes. Autant vous dire que les mecs sont cuits après un tel effort.»
Rod confirme: «Au début, on a l’impression de traîner une caravane dans le dos et de ne plus savoir tenir sur des patins.»
Reste que cette année, le jeune homme a subi un traitement légèrement différent de celui de ses coéquipiers de Genève-Servette. Drafté par les San Jose Sharks la saison passée, l’Aigle va passer deux semaines en juillet en Californie dans le camp de base de la franchise de NHL. Deux semaines durant lesquelles le reste du groupe de Chris McSorley bénéficiera d’une période de vacances.
Mais à 19 ans, Noah Rod ne cache évidemment pas son rêve d’évoluer, un jour, dans la plus prestigieuse ligue au monde. Même si pour décrocher une place au paradis, il faut se dire: «Au diable les vacances!» L’enfer.
Bio express
Né le 7 juin 1996 à La Chaux-de-Fonds.
2007 Il entame ses classes juniors à Forward Morges puis rejoint le Lausanne HC l’année suivante.
2011 Il s’engage avec les M17 de Ge/Servette.
Septembre 2013 Il effectue ses débuts en équipe première sous la houlette de Chris McSorley.
Mars 2014 Il qualifie les Aigles pour les demi-finales des play-off en inscrivant le penalty décisif face à Lugano.