21 mars 2016

Malgré les blessés, les suspendus et les malades, l’Aigle gagne en équipe à Lugano et égalise dans la série. Suite demain aux Vernets

 

Etait-ce vraiment une bonne chose pour Lugano de s’imposer 5-0 jeudi passé aux Vernets? Même si les joueurs répètent forcément que ce n’est pas le cas, que «ce n’est qu’un point», dans la tête, l’inconscient, ce coquin, joue parfois de sales tours. Cela débouche souvent, le match suivant, sur de la suffisance ou provoque le réveil d’un adversaire vexé et animé d’un sentiment de revanche. Le cadeau peut devenir un fardeau, surtout lorsqu’on a facilement gagné ses quarts de finale 4 à 0. L’an passé aussi, en quart de finale, les joueurs d’Outre-Gothard n’avaient pas su confirmer également leur break. Il n’est pas rare que l’histoire se répète, qu’elle attrape le hoquet…

 

Tombés dans la facilité

 

Les Tessinois, certainement trop sûrs de leur affaire, ont manqué l’occasion de frapper d’un gros coup derrière la tête une formation genevoise décimée par les blessures, les suspensions et la maladie. Après avoir pris logiquement l’ascendant au premier tiers (18e), Brunner, Bertaggia et les tricoteurs bianconeri ont ensuite cédé dans la facilité. Alors que les fans chantaient, Lugano a tourné à trois lignes, pour, au final, être puni d’avoir trop vite coupé leur moteur. C’était présomptueux.

 

«On savait pourtant que ce résultat de 5-0 à Genève ne reflétait pas le premier match, qu’il fallait nous méfier, pestait Grégory Hofmann à l’interview. Mais je pense surtout qu’on a payé nos erreurs offensives et que les Servettiens ont su en profiter.» Au final c’est 1 à 2 après prolongation, 1 à 1 dans la série, on efface tout et on repart du bon patin!

 

On ne pourra, dans tous les cas, jamais reprocher à Ge/Servette de faire preuve d’aboulie ou d’un quelconque comportement couard, pleutre ou timoré. Question de culture, cette formation façonnée par Chris McSorley donnera toujours tout et encore plus, tant qu’il y a de la vie et des envies. Surtout en play-off.

 

Même la défaite initiale, jeudi aux Vernets, n’avait pas atteint le moral des troupes. Ou si peu. Rod et Slater suspendus? C’était un premier coup dur. Rubin et Simek malades? Une tuile de plus. Et alors? Cette formation grenat possède un cœur de vainqueur. A l’instar d’un Robert Mayer qui a su d’emblée relever la tête après son black-out lors de l’acte I. Il a été parfait. Ou d’un Tom Pyatt qui avait faim de glace depuis le début des play-off (il n’avait plus joué depuis le 27 février à Lausanne): il a ridiculisé Maxim Lapierre sur l’égalisation (39e), sans compter son gros labeur. Ou un Matt D’Agostini omniprésent, aussi brillant que son casque jaune. Il y a aussi eu le devoir du sacrifice (Romain Loeffel a joué en attaque), du courage et du caractère à l’image de son géant, Eliot Antonietti, qui a inscrit ce but si important sur le tard, qui permet aux Aigles de reprendre l’avantage de la glace. Tout un symbole.

 

«Pas de petites stars!»

 

«Il n’y a pas de petites stars chez nous, sourit le héros de la soirée, on gagne ensemble.» Cela s’appelle l’union sacrée où tout le monde met la main au feu, en tuant de nombreuses pénalités, en jouant intelligemment, l’un pour l’autre.

 

Mais il s’en est passé des événements durant ces soixante-huit minutes. Quel match, quelles émotions! S’il y a eu deux poteaux des Genevois (Bezina et Lombardi) et une grosse domination des Aigles au deuxième et au troisième tiers (27 tirs à 13), la rencontre aurait très bien pu, toutefois, tourner d’un côté comme de l’autre. Surtout au début de la prolongation, où ce valeureux visiteur, qui aurait pu nourrir alors de gros regrets, a souffert, en infériorité numérique (pénalité sévère de Kast à 58’46’’) durant quarante-cinq secondes. «Mais Mayer et tous les gars devant lui ont vraiment tout donné défensivement avant qu’on se montre plus lucide sur la fin», se réjouissait un Kevin Romy conscient malgré tout qu’il ne faut pas s’enflammer. «Mais j’ai eu un peu de chance car j’ai raté mon shoot avant de reprendre le rebond, se marre Eliot Antonietti. Maintenant, c’est tombé sur moi mais cela aurait pu être n’importe lequel d’entre nous. Il a fallu gratter pour mettre le puck au fond. On avait tous la rage aujourd’hui, moi le premier…»

 

De marbre devant Lapierre

 

Contrairement au match de jeudi, les Genevois n’ont cette fois-ci pas répondu aux provocations. «Maxim Lapierre a essayé à nouveau, il a beaucoup parlé, voulait se battre, mais on avait décidé de l’ignorer. Il avait réussi son coup au premier match, mais là on n’est pas retombé dans le panneau.» La suite, c’est mardi. Avec probablement le retour de Fredrik Pettersson à Lugano.

 

Au fait, Ge/Servette s’était aussi imposé 5-0 il y a deux ans au Hallenstadion avant que Zurich ne remporte la série et le titre. Et si l’histoire se répétait…

 

Deux poids, deux mesures!

 

Est-il allé, ce week-end, pêcher le saumon, au théâtre avec sa compagne ou manger des queues de castor devant la basilique Notre-Dame? Ou a-t-il attrapé, lui aussi, la grippe intestinale? Directeur du bureau de la sécurité des joueurs, Stéphane Auger, ce si controversé ancien arbitre de NHL, n’a dans tous les cas toujours pas donné de nouvelles à propos de Jim Slater et de Noah Rod. Au Canada, il a certainement d’autres priorités. A moins que ce ne soit le juge Reto Steinmann qui étudie à son tour les images. Personne ne le sait…

 

Il n’en demeure pas moins que suite à leur «éventuelle charge à la tête» de Julien Vauclair et Stefan Ulmer jeudi lors de l’acte I, ils sont toujours suspendus «de manière provisionnelle». Mais jusqu’à quand? En attendant le verdict, ils ont assisté à la victoire des Grenat avec des fourmis aux pieds dans les tribunes de la Resega.

 

Que ce soit pour Chris McSorley ou Doug Shedden, ce flou est insupportable. Que ce soit à Genève ou à Lugano, comment peut-on préparer une demi-finale de play-off avec autant d’incertitudes? Quelle équipe se trouvera sur la glace demain? Entre les blessés, les malades et ses deux suspendus, Ge/Servette enregistrera-t-il cinq, quatre, trois, deux, un ou zéro retour? Les présumés coupables pourront-ils rejouer ce mardi, jeudi ou samedi? C’était allé bien plus vite pour Julien Sprunger, qui avait été blanchi dans la foulée pour une charge similaire à celle de l’Américain des Vernets. Deux poids, deux mesures? Comment peut-on à ce point manquer de constance? 

 

La grippe est de retour!

 

C’est la petite Olivia, 8 mois, qui l’a refilée à son papa! Malgré son masque et son casque intégral, Daniel Rubin, qui y avait échappé l'an dernier, a attrapé à son tour la grippe intestinale. Avant d’hésiter à rejoindre ses camarades samedi matin en avion, l’attaquant est finalement resté à Genève. Juraj Simek était déjà à Lugano quand ses maux à l’estomac sont apparus. Il n’a pas été en mesure de s’équiper. Et d’autres dans le vestiaire grenat commencent à être barbouillés. Les Genevois qui avaient été contaminés par ce virus l’an dernier craignent une nouvelle épidémie. Et serrent les fesses!

 

Le malheur des uns a fait toutefois le bonheur de Tim Traber, qui n’avait jamais autant (bien) joué avec les Grenat. Idem pour le jeune Thomas Heinimann (il aura 20 ans le 2 avril), qui a su saisir sa chance. «En enchaînant les parties, je prends de plus en plus confiance en moi, ce qui me permet d’élever mon niveau», sourit le jeune attaquant.

 

«C’est une grosse victoire d’équipe, avec des jeunes qui ont su prendre leurs responsabilités, renchérit Kevin Romy. Les play-off, avec un match tous les deux jours, c’est dur physiquement et mentalement, il est important d’avoir de la profondeur. Il y a un bon mouvement junior à Ge/Servette avec des garçons capables de jouer un rôle en demi-finale de play-off. C’est une belle satisfaction mais attention à ne pas s’enflammer.» En attendant leurs malades et leurs blessés, contre ce drôle de Lugano, l’Aigle s’agrippe!