Comme s’il y avait un pacte de non-agression entre Ge/Servette et LHC, les Genevois laissent encore filer le derby. Place à la Coupe
La scène, révélatrice, est encore plus explicite qu’une longue diatribe. Écœuré, démoralisé, Juraj Simek, qui branle la tête et écarte les bras, incrédule, devant le banc des Servettiens. «Mais comment faire pour marquer face à ce LHC?» Kevin Romy, venait d’échouer, seul en contre, devant Cristobal Huet, cette muraille infranchissable. On jouait la 15e minute et à ce moment-là, les deux attaquants des Vernets ont certainement compris qu’ils passeraient à nouveau une sale soirée. Après un arrêt époustouflant de Christophe Bays (16e), il a suffi que Marti rejoigne le banc d’infamie, qu’Etienne Froidevaux trouve un trou de souris, pour que la messe soit dite très tôt (18e) et que la mission devienne alors impossible.
Et, triste répétition, comme vendredi à Malley, comme depuis la saison dernière, ce Lausanne HC et son ange gardien ont fait le malheur des Servettiens. «On était motivé mais Huet était en verve et il a tout arrêté, peste Goran Bezina. On a un problème dans le dernier geste ainsi qu’en power play, c’est certain, mais face à quatre joueurs en permanence derrière, on n’y arrive décidément pas contre eux.» Les excuses sont faites pour s’en servir.
Après le premier acte de vendredi (défaite 5 à 1), il devait, forcément, se passer quelque chose sous les casques grenat: une rébellion, une prise de conscience, un truc qui ressemblait à de la fierté. Mais si on a senti dans un premier temps un peu plus d’envie du côté genevois, on a attendu en vain une véritable réaction et un gros sursaut d’orgueil, que quelqu’un, dans le camp de McSorley, ne jette l’allumette.
Or, contrairement aux derbies face à Fribourg Gottéron, il n’y a aucune émotion qui se dégage, pas une bagarre, aucune animosité, rien, le néant. Ou le sentiment qu’entre Ge/Servette et Lausanne, qui se connaissent peut-être trop bien, qui possèdent le même propriétaire, faut-il le rappeler, on est devenu trop poli sur la glace pour se chercher des crosses. A croire aussi que les dés sont pipés, qu’il y a une clause au bas d’un pacte de non-agression, entre les deux clubs, qui interdit aux Grenat de battre les Vaudois? Blague à part, depuis le retour des Lions en LNA, les joueurs de Chris McSorley restent sur un succès (après les tirs au but!) en six rencontres! Mince alors…
«Ce soir, il n’y a pas de honte à avoir perdu, mes joueurs ont tout donné, s’exclame Chris McSorley. C’est la meilleure équipe qui s’est inclinée. Le score ne reflète pas la physionomie du match, on a tout essayé mais on n’a pas réussi à tromper Huet. Mon équipe était motivée et on s’est créé beaucoup d’occasions. Pour moi il n’y a pas de malédiction lausannoise, c’est une équipe solide derrière…»
Et si Cody Almond, qui ne joue pas trop à Minnesota, revenait à Genève? D’ici là, l’Aigle aura peut-être enfin trouvé la solution pour battre Lausanne, le 24 octobre aux Vernets et Goran Bezina sera revenu en défense. En attendant, les Grenat coupent à cœur ce soir à Porrentruy, où ils espèrent bien retrouver la joie de la victoire…
Ajoie veut y croire
C’est un peu la fête du hockey dans l’arc jurassien. Ce soir, les amateurs devront faire leur choix et la concurrence sera rude. «Bienne joue à Saignelégier, Lausanne est à La Chaux-de-Fonds, Fribourg à Neuchâtel, et nous, nous accueillons Ge/Servette. Du coup, nous ne sommes pas sûrs de faire le plein.» Président d’Ajoie, Patrick Hauert ne boude pourtant pas son plaisir au moment d’accueillir les Aigles, à l’enseigne de la Coupe de Suisse.
Un tirage au sort très dirigé a débouché sur ces affiches régionales qui doivent booster une épreuve qui renaît de ses cendres quarante-deux ans après sa dernière édition. Du côté de Porrentruy, on n’est pas peu fier de recevoir ni plus ni moins que le «tenant» du titre. «C’est un honneur de jouer ce match contre une très bonne équipe de LNA, c’est certain, continue Patrick Hauert. On peut parler d’un match de gala. Mais nous voulons y croire. Genève aura joué la veille (ndlr: hier soir contre Lausanne) et peut-être que Chris McSorley fera souffler quelques joueurs.»
Difficile d’imaginer qu’une surprise puisse jaillir de ce premier tour tant l’écart entre formations de LNA et celles des échelons inférieurs ressemble à un gouffre. «Au niveau de la vitesse d’exécution et du patinage, c’est deux mondes différents, témoigne Gary Sheehan, le coach des Ajoulots. Autant en fin de saison, lors d’un barrage de promotion-relégation, la frontière entre les deux ligues peut se resserrer parfois, autant là, ce ne sera pas le cas. Ge/Servette est la meilleure équipe romande de ce début de saison. Elle tourne déjà très fort.»
Comme son président, Gary Sheehan veut y croire, un peu: «Pour mes joueurs, c’est une vraie chance de se mettre en valeur contre l’une des meilleures formations du pays. On va donc essayer de faire douter le plus longtemps possible notre adversaire. Et de glisser un petit grain de sable dans l’engrenage. Notre début de championnat est un peu hésitant (6e). Alors utilisons ce match de gala pour rebondir.»