Privés de neuf titulaires, dont trois étrangers, les Aigles ramènent un bon point de la capitale. Et maintenant place à la Coupe de Suisse
Il y a eu tout d’abord cette immense ferveur avec ce drapeau bernois qui descend lentement devant une foule qui hurle son hymne à la joie. Quand vous venez voir une rencontre dans la capitale, ce rituel immuable avec cet ours projeté en 3D a toujours quelque chose de poignant, qui peut terroriser n’importe quel hockeyeur, aussi fort soit-il. Imaginez un môme qui dispute dans cette Arena garnie par 16 000 spectateurs son premier match de LNA…
C’était le cas du tout jeune Enzo Guebey (18 ans), ce vendredi soir, appelé avec la une après le forfait de Henrik Tömmernes, resté à Genève pour assister à l’accouchement de son premier enfant. Avec ses copains juniors, Arnaud Riat (18 ans également), Neil Kyparissis et Guillaume Maillard (19 ans), qui jouent souvent devant des banquettes vides, c’est la première fois qu’ils avaient droit à un tel accueil si unique en Suisse. «C’était impressionnant, il n’y a pas de mot pour décrire ce qu’on vit ici dans la capitale du hockey, s’est exclamé le premier nommé, qui n’est pas prêt d’oublier ce baptême du feu. Mais les «anciens» nous ont beaucoup parlé avant la partie, pour qu’on ne stresse pas trop et que l’on prenne du plaisir…»
De quoi frissonner
Lorsqu’ils sont sortis du tunnel, qu’ils ont aperçus ce mur humain, cette tension, il y avait pourtant de quoi frissonner. Comme c’est souvent le cas lorsque Genève-Servette se présente dans cette «cathédrale», l’électricité chiffonne l’air et le jeu; très vite il y a le feu sur la glace. Ici, l’esthétisme ne reçoit jamais de carton d’invitation. Ça voltige, ça fustige, souvent à la limite de l’acceptable. L’Ours est intimidant. Après dix-huit minutes, il y avait déjà deux à zéro pour le SCB, avec Thomas Rüfenacht et Simon Bodenmann à la conclusion, profitant d’offrandes de Mark Arcobello et de Gaëtan Haas qui n’avaient même pas eu besoin de forcer leur talent. Avec un Leonardo Genoni impérial, qui a dégoûté Rubin (2e), Traber (8e), Heinimann (10e), Loeffel (17e), Damien Riat (33e) et Richard (37e), revenir avec quelque chose dans les mains, semblait bien compliqué.
Mais après ce départ qui n’annonçait rien de bon, les «gamins» n’ont jamais tremblé. Comme mardi face à Davos, ce Ge/Servette a joué son va-tout, sans complexe, avec beaucoup de culot et ce cœur qui renverse des montagnes. En face c’était pourtant un Berne grandeur mature, le champion en titre, qui restait sur neuf victoires consécutives…
Une énorme solidarité
Privés de neuf titulaires dont trois étrangers, les Grenat étaient promis à l’enfer. Mais après avoir croisé Lucifer au premier tiers, Fransson et ses potes ont trouvé la force de se sortir des griffes du plantigrade. Cette bande de plus en plus décimée a compensé ses nombreux blessés par une énorme solidarité, se jetant, à l’image de Petschenig, Vukovic et Richard, sur tous les pucks.
Avec un Robert Mayer aussi royal que mardi, les Genevois ont fait finalement mieux que de se défendre, pour revenir de nulle part. C’est Eliot Antonietti, de retour d’Ajoie, qui a tout d’abord marqué le but de l’espoir, à trois minutes de la fin. «C’était ma chance, j’ai su la saisir, se réjouissait le grand barbu. Mais je suis surtout content pour notre équipe qui a montré du caractère. Je suis aussi heureux pour tous ces jeunes qui nous ont vraiment bluffés. On leur avait dit avant la rencontre que c’était une grande patinoire, mais qu’ils ne devaient pas être impressionnés, ils ont su prendre leurs responsabilités!»
Et il s’en est fallu finalement d’un rien pour que les Aigles réussissent l’impossible exploit, Jeremy Wick égalisant à une minute du gong. Si les Servettiens ont dû finalement se contenter d’un très bon point dans la capitale, c’est lors de la cruelle séance de tirs au but, cette loterie qui n’a pas de cœur, qu’ils ont été contraints de tirer leur révérence au champion.
«Peut-être bien qu’à 2-0 les Bernois nous ont pris un peu de haut en nous laissant autant d’espaces, mais cela n’enlève rien à nos mérites, remarquait Goran Bezina à l’heure de l’interview. Cela fait maintenant trois matches qu’on joue bien, que l’on montre beaucoup de caractère. Si on garde cet état d’esprit, une fois que les blessés seront de retour, on va pouvoir continuer notre remontée au classement…»
En attendant, les Genevois se rendent ce samedi à Biasca où ils comptent bien charmer cette fois-ci Dame Coupe…