25 mars 2015

Les Lions prennent leur revanche et égalisent. «On a été nuls», s’exclame McSorley, qui a perdu Picard. La suite demain

 

La veille, Chris McSorley le savait. Ou, plutôt, il le redoutait, comme un vilain retour de boomerang. Comme s’il avait déjà vu le film d’horreur. «Vous verrez, Zurich va venir fort, le couteau entre les dents pour livrer son plus gros match de la saison.» Le coach de Ge/Servette était conscient que le champion, mené 2 à 1 dans la série, était attendu au tournant et qu’il ne raterait pas son virage devant le Jet d’eau. Et le «vieux singe» avait raison. Mais il n’imaginait certainement pas que Roman Wick et ses camarades du Hallenstadion infligeraient une telle correction aux Servettiens. «On a été nuls ce soir, même les pom-pom girls ont réalisé une meilleure performance que nous!» Sa brosse à dents dans les mains, le boss était dépité et peu motivé à analyser le «show» de ses hommes.

 

Quel retour de manivelle. On peut parler d’humiliation face à une formation de la Limmat qui ne s’était encore jamais imposée à Genève cette saison… «Maintenant 8-0 ou 2-1, cela revient au même en play-off», soupire un Romain Loeffel battu, mais pas abattu.

 

Trois jours après que Ge/Servette s’eût octroyé l’avantage de la glace, personne au Hallenstadion n’avait oublié ce bruit assourdissant n’annonçant rien de bon pour la suite pour les… Genevois. Un puck qui rebondit sur un poteau, ça donne des frissons dans le dos, ça sourit sur le moment à l’audacieux, mais ça peut aussi tourner une série. Tout le monde avait encore en mémoire ce tir de Ryan Shannon samedi avant qu’Alex Picard ne marque en prolongation…

 

Aux Vernets, il y avait aussi eu, il y a deux ans, ce même sentiment, lorsque Mathieu Carle avait lui aussi fait voltiger la rondelle sur le montant des buts de Bührer: la crêpe s’était elle aussi retournée et Berne avait alors quitté les quarts dans un carrosse avant de devenir champion dans la foulée. Un titre, une finale, se joue sur des détails. A quoi ça tient…

 

Hier, tout s’est «joué» en début de rencontre. «Il faut lui tirer dessus, il est vulnérable!» qu’ils disaient, tous en chœur, avant que MM. Vinnerborg et Kurmann ne lâchent les acteurs. La cible s’appelait Lukas Flüeler, le portier des Zurich Lions, si fébrile depuis le début de ces play-off. Ses jambes tremblaient si fort en début de partie, qu’il en avait même perdu deux fois sa canne. Mais ce n’est finalement pas lui qui a craqué, Robert Mayer rejoignant ses vestiaires à la 33e minute déjà alors que Roman Wick venait d’inscrire le troisième des huit buts de Lions affamés.

 

Les hommes de Crawford, qui avaient encore ce penalty-cadeau offert à D’Agostini jeudi ou le but gag de Loeffel réussi aussi lors de l’acte II en tête n’ont pas attendu longtemps avant de montrer qui était le plus fort sur la patinoire.

 

Comme redouté, c’est d’entrée que le visiteur a haussé le ton: quarante secondes (un shift) ont suffi à Blindenbacher et ses copains pour éliminer Picard du jeu (une charge de Künzle) et pour ouvrir la marque dans la continuité. Si les Grenat ont eu alors des opportunités de rectifier le tir via leur top scorer ou Rubin, le puck avait décidé de ne pas entrer. Roman Wick et Robert Nilsson ont pu alors étaler à leur tour toute leur classe sur la glace pour saler l’addition. Les Lions, si empruntés samedi, sont redevenus imposants comme par enchantement: cette équipe est si redoutable lorsqu’on la laisse faire. «Même si la sortie de Picard ne nous a pas aidés, nous n’avions pas le droit de perdre 8-0 dans une patinoire à guichets fermés», a conclu un Chris McSorley qui attend de ses hommes qu’ils réagissent comme des champions, comme les Zurich Lions!

 

Ici, c’est Zurich, au bord de l’Arve. Aïe (par Thierry Mertenat)

 

Les  victoires à l’extérieur servent à faire le plein quand on joue à la maison. Bourrée comme un œuf, la maison Grenat, ce mardi soir sur le coup de 19 h 45. On voulait un guichet fermé, on l’a, et les retardataires qui aiment regarder le match debout en sont pour leur frais. Dans les virages nord et sud, on distingue à peine la glace. Cinq rangs de spectateurs forment un supplément de tribune compact.

 

Les victoires à l’extérieur servent à rehausser l’enjeu des confrontations à domicile. La tension est palpable. Le soutien qui vient des gradins mélange l’euphorie et la discipline. Les gens sont contents d’être là, tout en étant inquiets de l’issue de la rencontre. Ils sont venus pour gagner et vont perdre. Les plus pessimistes le savent après quarante secondes déjà. Quand l’adversaire marque si vite, c’est qu’il a décidé, dès le départ, de contester le plaisir ambiant.

 

Douche tiède à la fin du premier tiers; douche froide à la fin du deuxième; sans eau ni savon durant les vingt dernières minutes. Les gens qui étaient arrivés en avance quittent l’enceinte avant la fin de cette interminable humiliation. «C’était mieux samedi passé à la télé», glisse cette supportrice qui a renoncé à faire les déplacements. Elle a raison et tort à la fois. La ferveur initiale console un peu de la correction subie. A l’entame, hier soir, c’était vraiment chaleureux. Les chants se répondaient d’une extrémité à l’autre de la patinoire. Soutien symphonique comme au Vélodrome à Marseille. Sauf qu’à la mi-match, les 150 supporters zurichois ont pris le dessus sonore. Avant de dérouler leur répertoire comme à la maison. Ici, c’est Zurich, au bord de l’Arve. Vexant? Non, rageant.

 

Une soirée cauchemardesque (par Benjamin Berger)

 

Soirée noire pour la troupe de Chris McSorley, corrigée – humiliée – à domicile par des Lions revanchards. Alors qu’elle avait toutes les cartes en main pour faire le break et mener 3-1 dans la série, la formation grenat a été incapable de déployer son jeu. Les Zurichois, eux, qui s’étaient inclinés samedi au Hallenstadion en prolongation après une réussite d’Alexandre Picard (1-2), ont remis les pendules à l’heure hier soir en venant à bout d’une équipe genevoise dont le visage était méconnaissable. «Nous sommes complètement passés à côté de notre match, a commenté Goran Bezina après la partie. De grosses erreurs individuelles nous ont coûté la partie. Maintenant, que nous perdions 1-0 ou 8-0 à la maison, le résultat reste le même: il y a 2-2 dans la série et nous allons devoir nous racheter dès jeudi à Zurich.»

 

Malgré la débandade, le capitaine des Aigles tenait toutefois à relativiser: «Les Lions n’ont fait qu’égaliser dans cette demi-finale et même s’ils ont repris l’avantage de la glace, nous avons prouvé que nous sommes capables de nous imposer chez eux. Avec ce résultat, notre envie de gagner une nouvelle fois là-bas ne sera que décuplée.»

 

Un sentiment partagé par un Daniel Rubin très remonté après la rencontre: «Ce scénario ne va pas se répéter, croyez-moi. Ce soir nous avons été mauvais comme jamais et nous avons bien l’intention de corriger le tir dès jeudi soir au Hallenstadion. C’est ça, la beauté des play-off: il ne faut jamais crier victoire trop vite et la rencontre de ce mardi face aux Lions a été une belle piqûre de rappel.»