Fessés aux Vernets samedi, les Aigles se rendront demain au Tessin en ayant perdu l’avantage de la glace. Attention, danger
Le trou noir. Un passage à vide inexplicable. Incompréhensible. Samedi soir aux Vernets, les Aigles ont piqué du bec au retour des vestiaires pour encaisser cinq buts en moins de huit minutes (7’ 16”!) pour permettre à Lugano d’égaliser à 2-2 dans la série des quarts de finale. Incompréhensible car, lors des vingt minutes initiales, les hommes de Chris McSorley avaient fait plus que bousculer les Tessinois.
«Je n’ai pas de mot pour expliquer ce qu’il s’est passé, a balbutié Frédéric Iglesias après la rencontre. Il y a eu des erreurs individuelles qui se sont payées cash, dont trois à la suite et on se prend un sec 3-0 dans les dents. C’est le scénario catastrophe et ça fait vraiment mal parce qu’au final Lugano ne mérite pas forcément de gagner ce match. La malchance était avec nous et ça fait mal d’encaisser un tel résultat.»
Et le défenseur des Grenat d’enchaîner: «C’est moche car ce petit laps de temps durant lequel nous n’étions pas dans la partie nous coûte l’avantage de la glace et permet à Lugano d’égaliser. On s’est fait bouffer et c’est d’autant plus rageant car on avait tout en main pour mener 3-1. Au lieu de cela on se retrouve à de nouveau devoir aller gagner là-bas.» Abattu mais pas vaincu, le No 56 a toutefois tenu à préciser que Ge/Servette n’était de loin pas mort dans cette série. «Il va maintenant falloir très vite analyser ce qu’il s’est passé dans ce deuxième tiers et corriger le tir pour se rendre à Lugano et nous imposer comme nous l’avions fait lors de l’acte I. Nous savons que nous pouvons le faire. C’est clair qu’après cette défaite les conditions ne sont pas faciles mais il va falloir se réveiller très vite car nous n’avons plus le droit de rêvasser. Je pense que si nous jouons pendant soixante minutes comme nous l’avons fait samedi durant le premier tiers, les Tessinois vont avoir énormément de peine à nous battre.»
Evacuer la défaite, la balayer. Tels sont les termes d’Iglesias qui, après avoir «grillé un joker», entend bien se rendre demain en terres luganaises après une grosse envie de revanche. Un sentiment partagé par son capitaine: Goran Bezina. «On a dominé sans marquer et après on oublie de jouer pendant dix minutes avec le résultat que l’on sait. On a été inexistant durant une courte période. Ça fait mal quand on sait que pendant vingt minutes les hommes de Patrick Fischer n’ont pas touché le puck. Puis, en revenant à 5-2, même peut-être 5-3 si Matt (ndlr: D’Agostini) avait marqué son penalty, on savait que ça allait être très dur de remonter cinq goals.»
Malgré la lourde défaite, le leader de la formation genevoise se refusait toutefois de tout remettre en question: «Notre travail a payé sur les trois premiers matches, même si le troisième s’est soldé par une défaite. Il ne faut pas croire que la série est finie parce qu’on s’est pris une baffe à domicile. Il y a 2-2 et tout est encore jouable malgré le fait que plusieurs gros joueurs manquent à l’appel en raison de blessures.»
Pour se faire pardonner, les Aigles auront dès demain l’occasion de prouver à leurs supporters qu’ils entendent bien s’envoler vers les demi-finales en allant chercher un nouveau point important au Tessin.
«On a du répondant» (par Grégoire Surdez)
C’est le genre de joueur qu’il vaut mieux avoir dans son équipe. Travailleur, costaud, dur au mal, avec juste ce qu’il faut de vice. Julian Walker est passé de Genève à Lugano au tout début de la saison 2013-2104. Et parfois on se dit qu’il ferait encore du bien dans l’alignement grenat. Walker, il a le profil idéal pour donner du poids et une touche technique aux 3es ou 4es trios offensifs. Dans cette série, c’est pour l’instant les situations à cinq contre cinq qui font la différence. A ce petit jeu, Lugano a une profondeur de banc supérieure qui lui permet de donner le la à des Aigles qui peinent à imposer leur jeu physique pendant 60 minutes. «On a prouvé qu’on avait du répondant sur ce plan-là, témoigne Julian Walker entre deux cris de guerre victorieux qui jaillissent du vestiaire des panthères. On sait que Genève frappe fort et essaie de jouer dur. Il faut l’accepter. Accepter de prendre des coups et répondre intelligemment, en gardant la tête froide. Nous avons aussi nos hommes forts qui savent faire mal.»
Après 20 minutes initiales avec la tête sous l’eau, comment Lugano a-t-il pu à ce point retourner cet acte IV? «On s’est dit qu’il fallait se mettre à patiner beaucoup plus fort. La défense a tenu le choc au début. C’était donc à nous, attaquants, de mettre Genève sous pression dans leur zone de défense afin de profiter de la moindre erreur.» Erreur de marquage, de relance, de placement, tous les joueurs grenat présents lors de ce début de second tiers en enfer sont à blâmer. «C’était en effet assez incroyable, sourit Walker. Maintenant, nous gardons la tête froide. On repart de zéro dans cette série en récupérant l’avantage de la glace. C’est un petit pas de plus que nous avons fait. Il en reste deux. A commencer par mardi à la maison.»
L’incroyable docteur du GSHC (par Grégoire Surdez)
En play-off, tous les coups sont permis. Les joueurs et les coaches sont prêts à tout pour gagner. Il y a donc les coups de poing. Les coups par derrière. Les coups bas, quand les arbitres ont le dos tourné. Il y a aussi les coups de gueule lorsque les joueurs se toisent et se dévoilent leur veine poétique.
Tout l’art, dans le fond, consiste à se balader sans cesse sur cette espèce de ligne sans tomber du côté obscur et de s’attirer les foudres de Dark Steinmann, le juge le plus unique de la galaxie. Samedi soir, une question a agité les travées des Vernets et alimenté les conversations. A une minute de la fin de la deuxième période, Timothy Kast a-t-il simulé une blessure juste après avoir obtenu un penalty? A-t-il accentué les effets du léger coup reçu sur la hanche gauche lors de l’accrochage? Le tout pour permettre à Matt D’Agostini, le top scorer genevois, de s’élancer à sa place pour tenter de faire revenir les Aigles à 3-5.
A le voir quitter ses camarades sur une patte, soutenu par deux membres du staff médical, difficile d’imaginer qu’il serait de retour, fringuant, pour le troisième tiers. Dès lors on a bien de la peine à imaginer qu’il n’y pas eu «combinazione». Ou alors, Genève-Servette possède un docteur capable de faire des miracles. Oui, cela doit être ça.
Nous aurions souhaité interroger l’intéressé, prendre de ses nouvelles. Mais en play-off, la communication est verrouillée à double tour. «Pas d’interview des joueurs blessés» Quand bien même ces derniers virevoltaient sur la glace de plus belle jusqu’au coup de gong final? «Non.»
On l’a déjà dit: tous les coups sont permis en play-off. Y compris les coups fourrés?