3 mars 2018

Coup de projecteur sur les hommes de l’ombre qui patinent en infériorité numérique. À Langnau, ils ont été brillants et décisifs

 

Ils ont le droit de tuer. Même sans permis. Ce sont des hockeyeurs pas tout à fait comme les autres. Pour eux, le sens du devoir et du sacrifice est une réalité quotidienne. Eux, ce sont les tueurs de pénalités. Ils sont alignés lorsque l’adversaire évolue avec un ou deux hommes de plus. Ils savent que chaque seconde volée dans ces situations spéciales est une seconde précieuse qui rapproche l’équipe du succès.

 

Pendant de très nombreuses saisons, Ge/Servette a cultivé l’art du box-play. Agressivité, mobilité, courage et organisation: tels sont les maîtres mots qui doivent être appliqués. Cet hiver, un changement de système a longtemps provoqué des dégâts. Et ces Aigles ne tuaient plus grand-chose. Trop souvent, les quatre joueurs alignés prenaient les contours de simples cônes alignés trop bas dans leur zone de défense. Quelque chose clochait dans le royaume du box-play des Vernets.

 

Enfin de l’agressivité

 

Il semblerait que depuis quelque temps, le staff technique a pris la mesure du désastre. Et mercredi soir, à Langnau, les Aigles ont sans doute gagné le match lors des longues minutes passées en infériorité lors de la troisième période. Comme au bon vieux temps.

 

Un homme symbolise ce renouveau. On pourrait même dire qu’il incarne l’archétype du tueur de pénalités. On veut bien sûr parler de Daniel Vukovic. De l’aveu de ses coaches et coéquipiers, «Vuko» a été énorme à l’Ilfis. Peu habitué à se mettre en avant, ce gros cœur grenat savoure tout de même. «Pour moi, chaque pénalité est comme un challenge, dit-il. Je peux dire que c’est mon métier et s’il faut se coucher sur un puck et se sacrifier, je n’hésiterai pas.»

 

En Suisse, peu de joueurs sont capables de prendre autant de place que le défenseur qui a développé de véritables techniques personnelles qu’il utilise sans modération. Comme le tueur à gages, le tueur de pénalités ne laisse rien au hasard. Il peut par exemple opter pour une canne plus longue afin d’augmenter son rayon d’action. Daniel Vukovic, lui, adopte souvent une position basse pour occuper un maximum de largeur devant un opposant. Il n’hésitera pas non plus à faire passer sa canne d’une main à l’autre pour mieux aller chatouiller le puck où bloquer une ligne de passe. «C’est vrai que c’est un peu ma spécialité, avoue-t-il. J’ai encore deux ou trois autres trucs que je ne dévoile pas!»

 

Tout le monde au diapason

 

À commencer par une capacité à endurer de très longues présences sur la glace. Il est parfois possible de devoir tenir l’entier d’une pénalité (deux minutes). Mais même avec un genou et demi à terre, «Vuko» ne lâchera jamais. «C’est un peu comme quand on gagne, on récupère mieux lorsqu’on parvient à tuer une pénalité.» Les acteurs du box-play sont tout sauf frustrés. «Pour moi, une pénalité tuée est aussi satisfaisante que de réussir un face-à-face, témoigne Robert Mayer. En infériorité, j’élève encore davantage le niveau de tous mes sens. C’est une phase de jeu intense, passionnante. On se doit d’être absolument tous dans le même mouvement pour être efficace.»

 

Gardien, défenseurs et attaquants au diapason. «C’est juste, renchérit Floran Douay, lui aussi impliqué dans la solide prestation de mercredi à Langnau. C’est un vrai travail d’équipe. On fait souvent l’éloge des joueurs qui marquent et un peu moins celle de ceux qui empêchent l’adversaire de marquer. Pour moi, un tir bloqué ou une passe interceptée me procure autant de satisfaction qu’un but ou un assist.»

 

Craig Woodcroft peut donc être rassuré. Ses tueurs de sang-froid sont de retour. Il leur a même fourni les armes techniques – enfin! – pour faire leur boulot proprement. Sans bavure.

 

Zoom sur les quatre acteurs majeurs du box-play

 

L'entraîneur Craig Woodcroft S’il y a bien un domaine dans lequel la patte de l’entraîneur est visible, c’est celui des situations spéciales. Craig Woodcroft a voulu changer l’ADN du box-play des Aigles en faisant la part belle à la passivité. La pause olympique a permis une mise à plat et un retour à un système beaucoup plus agressif.

 

Le gardien Robert Mayer Le dernier rempart joue évidemment un rôle central dans le dispositif. Les clefs? Un bon déplacement latéral et une capacité à ne pas laisser de rebonds sur les shoots. Robert Mayer précise: «Le regard est capital. Il ne faut pas hésiter à bouger pour voir le puck avant le départ d’un tir.»

 

Le défenseur Daniel Vukovic Positionné près du but, le défenseur doit nettoyer la zone du gardien. Il doit également couper les lignes de passe dans le slot. La technique? Il utilise sa canne et son corps pour prendre l’espace. Lorsque la rondelle est récupérée, il faut ensuite avoir la capacité de dégager son camp proprement.

 

L'attaquant Floran Douay L’attaquant, c’est le pit-bull. Dans la partie haute de la zone, il harcèle le porteur du puck et coupe l’axe de passe à la ligne bleue. «Il faut du chien pour jouer en box-play, sourit Douay. Quand on joue nous-même en power-play, on n’aime pas être pressé. On applique donc aux autres ce qui ne nous convient pas!»

 

Power-play

 

L’affiche Ge/Servette reçoit Berne samedi soir aux Vernets.

 

L’équipe Gauthier Descloux, Cody Almond, Kay Schweri et Jonathan Mercier sont blessés.

 

En tribune A priori, Craig Woodcroft devrait s’appuyer sur le même groupe que mercredi à Langnau. On devrait donc retrouver en tribune Eliot Antonietti, Michael Keränen, Will Petschenig et Tim Traber. Guillaume Maillard s’entraîne et joue avec les Juniors Elite.

 

Le point Rappel, Ge/Servette (8e) n’a besoin que d’un point pour assurer sa participation aux play-off. Dans la mesure où Langnau (9e) ferait lui le plein deux fois contre Kloten. Genève peut même, mathématiquement, lorgner la 6e place de Fribourg et la 7e de Davos.