10 janvier 2018

Mike Gillis, le supposé homme fort du club, est de retour en Suisse. Il a du pain sur la planche pour sortir le club de la crise

 

Depuis quelque temps, pas mal de regards se tournent vers la loge présidentielle. Plus isolé que jamais, Hugh Quennec est au centre de l’attention. Son club, asphyxié par une gestion aussi dispendieuse que douteuse, est au bord du gouffre. Un trou profond qui se creuse chaque jour et qui inquiète – enfin! – les dirigeants de la ligue nationale (lire ci-dessous). Des scénarios s’esquissent en coulisses pour que le hockey à Genève ne périsse pas. Le futur des Grenat rimera-t-il avec Mike Gillis et son groupe d’investisseurs? Rien n’est moins sûr.

 

Le Canadien, intronisé en grande pompe lors d’une mémorable conférence de presse en avril dernier, est enfin arrivé à Genève hier. Est-il vraiment le nouvel homme fort du club? Il devrait rapidement se positionner et donner quelques éclaircissements sur la situation et sur ses intentions. Il faut espérer qu’il sorte enfin de son silence.

 

La patte de Törmänen

 

L’ancien manager général des Vancouver Canucks débarque de Colombie-Britannique dans un climat très brumeux. En compagnie du président, du directeur du club, Pierre-Alain Regali, de l’administrateur, François Belanger, et de quelques sponsors, Mike Gillis a assisté au match compliqué des Aigles. Il a dû se dire que décidément, ce Bienne à qui tout sourit prend un malin plaisir à enrayer la mécanique genevoise.

 

Ce système de jeu teinté de sauce finlandaise par Antti Törmänen, fait de rigueur défensive et d’explosivité en contre, a une nouvelle fois fait merveille. De son côté, Craig Woodcroft n’a pas trouvé la solution. Une fois encore, le coach canadien s’est mué en Gargamel d’opérette pour tenter de trouver la potion magique. Sans succès. Une fois encore, il a bouleversé toutes ses lignes. Mais bon… Il paraît que lorsque l’équipe perd, c’est que les joueurs se sont extraits des schémas de jeu élaborés par le Canadien. Et lorsque l’équipe gagne, c’est forcément dans le respect des consignes. Craig Woodcroft est tellement influent que son ombre plane même sur les succès de ses ouailles lorsqu’il fait des infidélités à son club en allant jouer les utilités avec le Team Canada.

 

Un coach qui agace

 

Les attitudes parfois cassantes du successeur de Chris McSorley commencent gentiment et sûrement à agacer dans le vestiaire. Il ne faudrait pas qu’à la grave crise financière vienne s’ajouter un volet sportif nébuleux. Ce mois de janvier de tous les dangers hors de la glace commencerait-il à déteindre sur les joueurs?

 

Il n’est jamais simple dans un tel contexte de pratiquer son métier comme si de rien n’était. Interrogés, les joueurs assurent ne pas se soucier des turbulences. Preuve en est le fantastique envol de décembre. Cette série de victoires qui a connu un coup d’arrêt samedi à Bienne. Avec un bis repetita hier soir qui interroge. On a promis à Kevin Romy et Cie que les salaires seraient versés en janvier. Il faudra plus que des mots pour libérer tout le monde. Ce groupe a prouvé qu’il pouvait faire fi des soucis pour s’éloigner de la barre. Il ne faudrait pas que ces deux défaites soient autre chose que de simples couacs.

 

Le public, lui, fait preuve de patience. Il reconnaît les efforts fournis par les joueurs. Au moment d’aller saluer leurs fans, les Aigles ont pu sentir que pas grand monde ne leur tient rigueur de ces deux derniers matches balbutiés. Un peu comme si tous les regards étaient encore tournés vers la loge présidentielle.

 

La ligue a demandé à Genève-Servette de lui présenter ses comptes

 

«Nous suivons la situation financière de Genève-Servette avec la plus grande attention. C’est tout ce que je peux dire.»

 

Denis Vaucher, directeur de la National League de hockey et membre de la commission des licences, demeure prudent sans pour autant nier l’information: la ligue suisse a semble-t-il ordonné au club genevois de lui présenter ses comptes.

 

Autrement dit: Genève-Servette aurait encore quelques jours pour envoyer une photographie complète de sa situation financière. On imagine que la question des charges sociales, entre autres, sera particulièrement examinée, au même titre que la profondeur du trou financier. Une preuve de plus que rien n’est simple en ce mois de janvier pour le club.

 

Il faut être persuadé que la ligue est très attentive aux lourds problèmes de liquidités qui frappent la trésorerie des Grenat. D’autant plus pour un club présidé par Hugh Quennec, dont la double participation actionnariale à l’époque, au GSHC et au LHC, en avait froissé plus d’un dans les sphères dirigeantes du hockey suisse. La pression s’accentue donc autour du président, qui cherche des solutions pour traverser cette grave crise financière.

 

Il se murmure que Hugh Quennec aurait tenté il n’y a pas si longtemps de trouver le soutien de partenaires russes. Qu’il aurait aussi pu solliciter dernièrement des investisseurs asiatiques (en Chine?). Sans succès. Si Lorne Henning se démène pour calmer les joueurs et le staff en assurant qu’une solution a été trouvée et que les salaires de janvier seront versés d’une manière ou d’une autre (à travers un prêt, un mécène ou autre?), l’étranglement financier n’en finit pas d’inquiéter.

 

Pas que la ligue d’ailleurs. Des investisseurs locaux s’organisent de leur côté pour trouver des solutions durables. Ce sont des proches du club qui sont prêts à prendre des responsabilités en commençant par boucher le déficit dans les comptes: selon ces acteurs-là, qui ne tiennent pas encore à se manifester ouvertement, ce trou dépasserait déjà les 7 millions de francs. De quoi sérieusement alerter les cinq membres du conseil d’administration de la SA de Genève-Servette sur leur devoir de dénoncer à un juge une situation de grave surendettement, si tel est le cas. (Daniel Visentini.)