5 février 2016

La double casquette de Hugh Quennec irrite les instances du hockey suisse et les autres clubs. Le derby contre le LHC sera très suivi…

 

Retour à l’expéditeur! Mercredi soir, Chris McSorley était à Malley pour assister à la finale de la Coupe de Suisse. Un déplacement profitable pour le boss de Ge/Servette. «C’était l’occasion d’observer de près notre prochain adversaire ainsi que le leader du championnat. C’est toujours intéressant d’être au bord de la glace plutôt que devant la télévision.»

 

Le Canadien est comme ses joueurs lorsqu’ils ciblent un adversaire à charger: il fait rarement le voyage pour rien. Pas question, donc, de préparer le cinquième derby lémanique de la saison à la légère. Comme toujours, il demandera à ses hommes de tout donner ce soir contre le LHC. Et tant pis pour ceux qui imaginent que les Aigles battent de l’aile volontairement lorsqu’ils rencontrent les Lions. Depuis que l’implication de Hugh Quennec au LHC a été rendue publique, le climat s’est alourdi. Jusqu’à devenir nauséabond le 22 décembre. Et l’on se souvient de ces individus encagoulés spécialisés dans le guet-apens rocailleux.

 

Cinq semaines après ce derby, sinon de la honte, tout du moins de la bêtise crasse, Chris McSorley était de retour sur les lieux du «crime». «J’en ai profité pour ramener les pierres à Lausanne, sourit-il. Plus sérieusement, je n’ai eu aucune crainte à retourner là-bas. Je ne voudrais pas que l’on assimile tous les fans lausannois à ces quelques fanatiques. Je veux aussi dire que le GSHC demande à ses supporters de faire preuve de classe et de ne répondre en aucun cas à ce qui s’est passé le 22 décembre.»

 

L’actionnaire qui dérange

 

Trois jours avant cette fameuse rencontre – gagnée par Ge/Servette – le conseil d’administration du LHC avait fait le choix de convoquer la presse pour dénoncer les errances de l’actionnaire majoritaire, un certain Hugh Quennec… Et le président Patrick de Preux et ses condisciples de jouer les vierges effarouchées en prétendant qu’ils n’avaient découvert qu’en 2015 l’identité de ce fameux actionnaire. Des propos qui ont fait sourire, jaune ou pas, dans les salons cosy où l’on cause hockey, un peu, et business, beaucoup.

 

Le directoire expliquera avoir pris la décision de mettre sur la place publique ces affaires internes car l’actionnaire ne lui semblait ni disposé ni en mesure de réaliser les investissements nécessaires. Le LHC se prépare à vivre une période de transition de deux ans, durant laquelle il va quitter ses murs. Le temps que la patinoire de Malley soit entièrement reconstruite. Il fallait donc mettre la pression sur Hugh Quennec. Pour qu’il quitte le navire, bien sûr.

 

La perspective de pouvoir s’appuyer sur une arène flambant neuve à l’horizon 2018 excite visiblement les appétits du côté de la capitale olympique. Au point de provoquer la panique au sein d’un conseil d’administration qui constate avec une certaine amertume qu’il ne pourra pas agir à sa guise. C’est donc un peu en désespoir de cause que le CA du LHC a choisi d’endosser le costume de chevalier blanc et de dire tout haut ce que tout le monde pensait tout bas.

 

Enfoncer des portes ouvertes peut tout de même provoquer des courants d’air. La révélation de ce secret de Polichinelle (le LHC est propriété de Quennec) a donc eu le don d’exciter le public lausannois, aussi prompt à oublier le sauvetage genevois de 2007 qu’à produire des affichettes incitant Hugh Quennec à «dégager». Clou de cette soirée pourrie, le lamentable caillassage du bus grenat.

 

Calmer tout le monde

 

Autre conséquence – positive cette fois – de ce déballage, la Ligue nationale a décidé de revoir ses règlements pour obliger le président de Ge/Servette à céder tout ou partie de ses actions lausannoises afin de ne plus être majoritaire dans deux clubs. Ce double jeu, malsain, mais toléré jusque-là, a fait naître des crispations dans les autres organisations de LNA. Certains dirigeants de la Ligue et des clubs mettant publiquement en cause l’intégrité des deux équipes. Plusieurs sources internes à la Ligue affirment que certains clubs ont œuvré pour faire annuler les résultats de tous les derbys entre Ge/Servette et LHC. En vain.

 

Un délai a été fixé d’entente entre Hugh Quennec et les instances du hockey suisse: d’ici au 17 février, l’omniprésident devra se conformer au futur règlement de la Ligue. Il en a pris publiquement l’engagement. De quoi calmer tout le monde, sauf les Aigles. 

 

Les joueurs rient jaune

 

Ils ne pouvaient pas y couper. Coaches et joueurs du GSHC ont eu vent des discussions agitant le microcosme du hockey suisse depuis le 18 décembre, date du grand déballage du conseil d’administration du LHC. Le double jeu de Hugh Quennec a fait naître la suspicion. «On a lu certaines choses qui ne font pas plaisir, dit Eliot Antonietti. Mais on ne prend pas au sérieux ceux qui pourraient croire que l’on ne joue pas nos matches contre Lausanne à fond. Ce sont des affirmations ridicules qui mettent en doute notre intégrité. J’en ai parlé avec mon frère, qui joue là-bas. On en rigole.»

 

Depuis le retour du LHC en LNA en 2013, les Vaudois ont pris un malin plaisir à pourrir les soirées des joueurs et des fans genevois. Avec un système ultradéfensif et agressif, Lausanne est l’adversaire que les Aigles – mais ils ne sont pas les seuls – n’aiment pas rencontrer. Depuis la promotion des Lions, 14 matches ont opposé les rivaux lémaniques. Sur 42 points en jeu, Lausanne en a récolté 26 contre 16 à Genève (6-6 cette saison). On est donc loin du hold-up dénoncé à demi-mot par certains dirigeants de clubs alémaniques mal barrés.

 

«Les parties contre Lausanne sont toujours serrées parce que c’est une équipe difficile à jouer, dit le capitaine Goran Bezina. Mais, que ce soit du côté du staff, ou de nous, les joueurs, je peux vous assurer que l’on n’a jamais laissé gagner Lausanne. Ou qui que ce soit d’autre d’ailleurs. Les Suisses alémaniques s’arrangent beaucoup plus entre eux que nous!» Et paf!

 

Un message subliminal envoyé outre-Sarine, où la Fédération n’a pas caché son agacement dans un premier temps. «Je ne peux que vous confirmer que sans l’engagement formel de Hugh Quennec de se mettre en règle, le match de ce vendredi aurait sans doute été reporté, nous a dit Marc Furrer, président de la Swiss Ice Hockey Federation. Oui, c’est ce que nous envisagions. Il y a maintenant une date butoir et les choses vont dans le bon sens. Nous avons eu des discussions constructives.»

 

Aux Vernets, une certaine lassitude pointe à l’évocation de cette situation délicate dans laquelle Hugh Quennec a plongé les Aigles. «Vivement que tout cela cesse», dit-on d’une seule voix. Et que le sport revienne au centre du débat. «Nous, on se bat pour être premiers ou deuxièmes, dit Goran Bezina. On ne lâchera rien. On a envie de boucler ce sprint final en beauté. A commencer par deux victoires ce week-end, contre Lausanne et Fribourg.» 

 

Power-play

 

Les affiches Ce soir aux Vernets, Ge/Servette s’attaque au LHC avant de se rendre demain à Fribourg pour y défier Gottéron. Les deux parties se dérouleront à 19 h 45. C’est Michael Küng et Didier Massy qui dirigeront le premier derby du week-end. Le second, à Saint-Léonard, a été confié au duo Stefan Eichmann-Andreas Koch.

 

Absents Christophe Bays, Cody Almond, Jim Slater et Arnaud Jacquemet sont toujours indisponibles. L’attaquant valaisan, qui souffre de la nuque, pourrait revenir après la pause de l’équipe nationale (16 février contre Davos?)

 

Les Vernets en vert Ambiance verte ce soir aux Vernets. Les Services industriels de Genève (SIG) offriront une écharpe spéciale à tous les spectateurs. Les Aigles n’évolueront toutefois pas avec les couleurs de l’espoir. Ils joueront également en grenat à la BCF Arena contre des Dragons qui porteront, eux, une tenue spéciale.