17

Goran Bezina, 36 ans, va disputer son 102e match de play-off en LNA ce soir face à Lugano. L’indéboulonnable leader et capitaine de GE Servette se dit «serein».

 

Goran Bezina, pour la troisième année de suite, vous défiez Lugano en play-off. Avant cette série, vous vous dites plutôt «jamais deux sans trois» ou «deux c’est assez, trois c’est trop»?

 

Ni l’un ni l’autre. Je me dis juste que nous avons battu cette équipe les deux années précédentes, mais que ce n’est plus la même.

 

En quoi est-elle différente?

 

Elle est toujours aussi talentueuse, mais elle a davantage de caractère. Après, on sait aussi que, si on joue physique contre certains d’entre eux, ils disparaissent facilement de la circulation.

 

Faut-il en déduire que les émotions seront de retour dans votre jeu?

 

Contre FR Gottéron, on avait reçu des consignes. On devait rester calme. On savait que, si on ne répondait pas aux provocations, on avait une bien meilleure équipe.

 

Mission accomplie!

 

Bon, on en a aussi pris plein la tronche. J’aimerais bien que les arbitres soient plus vigilants sur les charges contre la tête. Ils doivent nous protéger pour que l’on ne se protège pas entre nous sur la glace.

 

Ce qui a étonné l’observateur, c’est le calme olympien affiché par Chris McSorley. Qu’en dites-vous?

 

Comme il nous a demandé de maîtriser nos émotions, il pouvait difficilement faire l’inverse.

 

Chaque fois qu’on lui parle de ça, il dit qu’il a assez de leaders dans le vestiaire pour rester davantage en retrait…

 

Du leadership, il y en a toujours eu à Genève. Non, la raison est ailleurs. Chris s’est plus investi pour préparer l’équipe. Il a moins d’autres choses en tête. Il a su davantage déléguer. Tactiquement, nous sommes meilleurs. Durant la saison, tout s’est bien imbriqué. On a battu tout le monde au moins une fois. On a été constant. On sent qu’on peut faire un truc cette année. On sent de l’énergie autour de l’équipe et sur la glace. On a cultivé un esprit de la gagne. C’est plus simple pour lui et pour tout le monde.

 

Pour vous, est-ce plus simple que l’année dernière?

 

Je suis plus serein par rapport à il y a douze mois. Avec tout ce qui s’était passé la saison dernière (ndlr: Chris McSorley l’avait fait jouer attaquant, notamment), ce n’était pas évident. Mais, là, les choses sont redevenues claires.

 

Quand on parle de la défense de GE Servette, on évoque désormais davantage Romain Loeffel et Johan Fransson. Ça vous dérange?

 

On a assez parlé de moi et on en parle encore. En fait, à un moment donné, j’avais peur pour le hockey suisse quand je voyais qu’il n’y avait rien qui arrivait derrière. Maintenant, voir évoluer un gars comme Romain, c’est un régal, et c’est rassurant. Et puis, quand tu l’observes en power play, tu comprends pourquoi tu ne joues plus dans cette situation de jeu.

 

Votre ego en a-t-il pris un coup?

 

J’ai toujours mis mon ego de côté pour le bien de l’équipe. Cela dit, de l’ego, il en faut de toute façon pour être le capitaine de cette équipe et défendre ses intérêts sur la glace.

 

Pourtant, votre nouveau rôle sur la glace n’a pas été facile à accepter…

 

Ce n’est pas une question d’ego, mais de style de jeu. J’ai toujours été habitué à porter le puck vers l’avant. Le problème, c’est que je n’avais plus les jambes pour y arriver efficacement et, en même temps, pour faire correctement mon travail défensif. J’ai dû revenir à la base, jouer plus simple. Petit à petit, tout s’est remis en place.

 

Qui vous a fait ouvrir les yeux? Chris McSorley?

 

Non, on en était arrivé à un tel point qu’on ne pouvait plus communiquer ensemble correctement. J’en ai parlé avec mon agent, avec d’autres défenseurs, avec mon père. Je suis également assez autocritique pour me rendre compte de certaines choses. La conclusion était limpide: si je voulais durer quelques années de plus, je devais adapter mon style de jeu.

 

Savez-vous qui est le meilleur compteur de GE Servette en play-off?

 

Kevin Romy.

 

Et qui vient juste derrière?

 

Moi. Pourquoi?

 

Cinq points pour un défenseur qui n’est plus utilisé en power play et qui bénéficie de moins de temps de jeu, c’est pas mal du tout, non?

 

Ces points, je les accumule grâce à mes coéquipiers. S’ils n’étaient pas là pour se battre devant les buts adverses et récupérer les rebonds accordés par le gardien sur mes tirs, je n’en aurais pas.

 

Comme vous arrivez en fin de contrat, est-ce que vous vous dites que c’est peut-être la der qui sonne pour gagner un titre avec Genève?

 

Je ne me suis jamais dit ça, ni en 2008 ni en 2010, et encore moins maintenant. Quand tu arrives à ce stade de la saison, tu ne te dis qu’une seule et unique chose: je vais tout donner.