3 octobre 2015

Un succès propre et net: les Aigles ont réalisé leur meilleur match de la saison. Tout bon avant de recevoir ce soir Davos, le champion

 

C’est sans doute le bon chemin. Tout du moins commence-t-il à ressembler à celui dessiné par Chris McSorley et Louis Matte. Il y a des absents, il y a encore du boulot, c’est certain, mais Ge/Servette monte gentiment en puissance. On ne repart pas du Hallenstadion avec trois points dans ses bagages sans y avoir mis du cœur. Après une série de quatre revers, les Aigles avaient retrouvé des couleurs il y a une semaine contre le HC Bienne. Un succès (3-2) étriqué et un peu heureux après un final de folie.

 

Libérés, délivrés, c’est comme s’ils avaient promis de ne plus jamais (se) mentir sur la glace. Les Grenat avaient-ils enfin livré leur match de référence? «On a enfin vu le vrai Ge/Servette, avait souri Chris McSorley. Il faudra confirmer.» C’est chose faite depuis cette escapade zurichoise que les Aigles ont entamée tambour battant dans une première période qui peut, elle, être classée au rayon des tiers de référence. «On fait une entame de match excellente», sourit Marco Pedretti. Le Jurassien a inscrit un but, libérateur, son premier en championnat avec un Aigle sur la poitrine: «Il me fait du bien, c’est vrai. Chaque jour je donne tout pour prouver que je peux me faire une place. Depuis qu’il y a des blessés, j’en profite un peu. C’est malheureux pour ceux qui ne sont pas là. Mais c’est aussi ça le message du coach: savoir hausser son propre niveau quand l’occasion se présente.»

 

La jeunesse triomphante

 

Il faut aussi voir dans cette ouverture du score de Pedretti comme le symbole du style de jeu développé par Chris McSorley. Un jeu direct vers le but adverse. Il faut un bon coup de patin – quelle accélération toute en puissance de Floran Douay. Il faut ensuite un puck lancé sur le gardien. Et pour conclure, il faut un Bruntrutain costaud qui suit et prend le rebond. «Ce n’est pas le plus beau de ma carrière mais il est important», dit justement l’attaquant grenat.

 

C’est une réussite qui a parfaitement lancé la machine genevoise et qui a semé le doute dans le camp zurichois. Le public, les scouts de NHL, ils étaient tous venus voir Auston Matthews (lire ci-contre) , ils auront surtout vu la jeunesse triomphante des Aigles.

 

En chef de file, Damien Riat a lui aussi montré que le talent n’attendait pas le nombre des années. Par deux fois en supériorité numérique, il a offert deux passes lumineuses. La première à un Matt D’Agostini retrouvé. La seconde à Noah Rod. «On se connaît avec Damien, on a déjà souvent joué ensemble en équipe de Suisse junior, dit le (peut-être) futur joueur des San José Sharks. C’est vrai qu’on s’est bien trouvé ce soir. Maintenant, nous n’allons pas nous enflammer. Mais on peut dire qu’on a sorti un gros match.»

 

Ne pas bomber le torse

 

Malgré la sévérité du score, personne sans doute ne bombera trop fort le torse dans un vestiaire qui respirait la joie de vivre, hier soir à Zurich. Parce que le «Z» a touché les montants. Parce qu’il a mis Genève dans ses petits patins dans la période médiane. Mais la chance, si elle ne se provoque pas forcément, elle doit pouvoir se saisir. C’est ce qu’ont fait Robert Mayer et Cie. Le gardien a ouvert grandes ses jambières et sa mitaine pour dégoûter Auston Matthews et s’offrir un premier blanchissage. «Nous sommes la première équipe contre laquelle, il ne marque aucun point. Cela fait une satisfaction de plus. Car même si on l’a peu vu. Il est sacrément impressionnant», conclut Marco Pedretti.

 

Ce mutisme offensif a même décontenancé le coach du «Z» qui a sorti son gardien à huit minutes de la fin déjà (but de Rubin). Comme pour signifier qu’il n’y avait plus rien à faire contre cet adversaire qui patine sur le bon chemin. 

 

Ils étaient venus voir Matthews, ils ont vu Riat

 

C’est sans aucun doute un phénomène qui va aller en s’accélérant. Auston Matthews, 18 ans et sans doute toutes ses dents, attire les regards à chacune de ses apparitions. Dans les travées du Hallenstadion, le No 34 n’a pas tardé à trouver preneur. C’est que le maillot du jeune américain sera collector dans un an déjà. Appelé à devenir la future star du hockey mondial, il attise toutes les convoitises. Hier à Zurich, six représentants des clubs de NHL étaient dans les tribunes, un carnet de notes – à moins que ce ne soit un carnet de chèque – à la main. Cinq d’entre eux étaient là spécialement pour étudier le phénomène. Souvent basés en Europe, ces scouts n’ont pas raté une miette des apparitions Matthews. Winnipeg, Colorado, Washington, Buffalo et Ottawa avaient donc dépêché leur espion. Le sixième agent spécial travaille, lui, pour Detroit. «Il n’y a aucune chance que Matthews signe chez nous car il sera sans doute No 1 de la prochaine draft, explique Vladimir Havjlu. Notre équipe héritera plutôt d’un joueur classé aux environ de la vingtième position.»

 

Le système outre-Atlantique est ainsi fait que chaque saison, les équipes les plus faibles choisissent les juniors les plus prometteurs de la planète hockey. Le scout tchèque des Red Wings a donc passé sa soirée à noter d’autres noms que celui de Matthews. «Zurich a une bonne filière, dit-il. Et Damien Riat? On le connaît, il jouait en Suède l’an passé. C’est un joueur qui progresse lentement mais sûrement. Jusqu’à maintenant, il n’a jamais stagné. Il a de très bonnes habiletés techniques et un bon sens du jeu. J’ai adoré sa deuxième passe de but. Il a le potentiel pour séduire des clubs de NHL.» Et les cinq autres? Ils sont venus voir Matthews mais ils ont vu Riat!