22 novembre 2017

Tout devait couler de source? Le dossier patinoire est grippé et le club pourrait en subir de très graves conséquences

 

L’enfer est pavé de bonnes intentions. Pour un Genève-Servette qui a décidé de sa propre révolution de palais, il y a quelques mois déjà, tout se complique. L’histoire devait s’écrire dans la plus grande sérénité. C’est tout le contraire: entre la mise sous l’éteignoir de celui qui incarnait le club, Chris McSorley, et la restructuration interne, étroitement articulée autour du projet de la nouvelle patinoire du Trèfle-Blanc, rien n’a été un long fleuve tranquille.

 

Sportivement, l’arrivée à la bande de Craig Woodcroft ne s’accompagne pas encore des résultats escomptés sur la glace. Financièrement, les soucis qui ne devaient jamais exister avec les nouveaux investisseurs canadiens surgissent. On a déjà relayé ici le tumulte grandissant de toutes ces inquiétudes pécuniaires; Le Matin en a rappelé le danger dans son édition du 21 novembre. C’est toute la question: quel est l’état de la situation et quelles sont les perspectives pour le club, ainsi que les intentions de ceux qui veulent le porter au travers de la nouvelle enceinte à construire?

 

Le Trèfle-Blanc au cœur de tout

 

Dans sa volonté d’expansion, Genève-Servette a voulu voir grand: de nouveaux investisseurs, une nouvelle patinoire, un projet global pour grandir et viser le titre avec des infrastructures modernes. C’est louable. Mais au cœur de ce projet, il y a l’édification de la nouvelle enceinte, au Trèfle-Blanc. Et c’est là le nœud gordien du problème. En résumé? Le président Hugh Quennec a demandé à des investisseurs canadiens, dont Mike Gillis, de prendre des responsabilités au sein du club. Parallèlement, un autre groupe d’investisseurs, Gillis faisant le lien, a été formé pour financer le projet de la nouvelle patinoire. L’un n’allant pas sans l’autre, tout semble se bloquer aujourd’hui.

 

Le blocage?

 

Il concerne évidemment la nouvelle patinoire. À la fin de juin, l’État et la Ville, après un fastidieux travail de «due diligence» sur l’origine des fonds et la surface financière des investisseurs prêts à mettre 300 millions dans le projet, annonçaient que les feux étaient au vert. Que non seulement la surface financière et l’origine des fonds étaient en ordre, mais aussi que le savoir-faire dans le domaine de la construction de telles enceintes était assuré. Avec un groupe d’investisseurs capable de prendre l’entièreté du financement à sa charge, en apportant notamment 150 millions de fonds propres (!), tout devait couler de source, sans vagues.

 

Sauf qu’il y a un hic. Une ligne sibylline dans le communiqué des autorités genevoises rappelant aux investisseurs la nécessité d’un appel d’offres pour une concession de travaux en cas de partenariat public-privé. En déchiffrant: cela signifie qu’il pourrait y avoir, dans le cadre de la nouvelle patinoire, une mise au concours des investisseurs intéressés, le groupe canado-allemand présenté jusqu’alors n’ayant pas l’assurance d’être choisi. Même si ce sont eux qui ont tout initié. Même s’ils prennent tous les coûts à leur charge. En fait, des avis de droits ont été demandés de part et d’autre et c’est complexe. Même en portant un projet 100% privé sur le plan de l’investissement financier, certains seraient prêts à considérer que le caractère public-privé existe, le sol appartenant aux autorités. Et qu’un appel d’offres doit avoir lieu, au grand dam du groupe canado-allemand prêt à s’engager.

 

Les conséquences

 

Les dégâts collatéraux touchent Genève-Servette de plein fouet. Comme tout est lié, les investisseurs de la nouvelle patinoire, qui avaient provisionné 3 millions pour le développement de leur projet, n’ont pas versé cet argent au GSHC, faute d’être assurés d’être bien choisis pour ledit projet et pas à la merci d’une mise au concours. C’est donc le club qui a supporté les coûts de développement du dossier. De plus, le GSHC attend toujours le versement de la subvention pour l’association Genève Futur. Là aussi, c’est le club qui a avancé la somme. Bref, un trou important s’est creusé, le communiqué du club parlant de «trésorerie tendue qui pourrait se détériorer ces prochains mois». Il est précisé que les salaires sont payés en temps et en heure. Mais aussi, autre dégât collatéral, que si Mike Gillis n’a toujours pas entrepris l’achat de 50% des actions de Hugh Quennec, c’est bien parce que cela aussi est conditionné à l’avancement du projet de la nouvelle patinoire, avec les investisseurs que Gillis connaît, bien sûr.

 

Oui, la situation est très complexe. Et dangereuse pour Genève-Servette, pour tout dire (lire ci-contre).

 

Le scénario catastrophe

 

Ce mardi, les investisseurs prêts à s’engager pour la nouvelle patinoire ont eux aussi tenu à se manifester. Par le biais de Dirk Hagge, qui représente le fonds d’investissement Anglo-German Progressive Fund Ltd (qui gère notamment l’argent de la famille Quandt, important actionnaire de BMW), ils ont rappelé «que malgré un long travail de «due diligence» effectué par Ernst & Young, positif sur la réputation et sur la solidité financière, nous n’avons jusqu’à présent pas reçu d’assurances claires». De la part des autorités genevoises, s’entend. Ils attendent une confirmation qui les rassurerait, à tout le moins une lettre d’intention pour s’engager formellement, comme prévu.

 

Le danger est immense. Dans le cas d’un scénario catastrophe, voici ce qui pourrait se passer. L’État, si échaudé par le précédent «Stade de Genève», campe sur ses positions strictes. Les investisseurs, qui se sont donné jusqu’à la fin de l’année pour être désignés, sans concours, se retirent. Du GSHC (Gillis and Co.) comme du projet de la nouvelle patinoire. Le club se retrouve avec un trou énorme dans son budget qui peut faire craindre le pire. Et les autorités, sans personne pour financer une enceinte de cette qualité. À moins que Chris McSorley ne sorte une carte magique de sa manche, le scénario fait froid dans le dos. On veut croire qu’une solution est encore possible…