12 juillet 2017

Peter Gall, représentant des investisseurs, lève le voile en exclusivité sur le complexe qui doit être construit sur le site du Trèfle-Blanc. Financement, viabilité: il répond

 

De ce projet de nouvelle patinoire pourtant indispensable au Genève-Servette Hockey Club et à toute une agglomération, on ne percevait jusque-là que l’obsédant murmure. On savait les intentions, figées depuis septembre 2016 et cette première rencontre entre le groupe d’investisseurs et les autorités du Canton et de la Ville. Neuf mois plus tard, la minutieuse et si longue vérification de la capacité financière et technique, ainsi que de l’origine des fonds, permet enfin d’aller de l’avant. Feu vert sur ces trois points après une «due diligence» étendue. Les autorités, qui avaient demandé un audit à Ernst & Young, ont validé le sérieux des investisseurs au début de ce mois. Restait à connaître la nature exacte du projet et les noms de ces investisseurs restés si discrets jusqu’à présent (lire ci-contre).

 

La genèse du projet

 

Peter Gall est un avocat canadien qui aime le hockey et qui connaît beaucoup de monde dans le milieu de ce sport. «Au départ, nous étions présents en Suisse pour acheter le Lausanne HC, puisque Hugh Quennec vendait ses actions, explique-t-il. Cela ne s’est pas fait. Mais ensuite, il y a eu une opportunité de faire quelque chose avec Genève-Servette. Il y avait une envie de créer un club encore plus fort, sur des fondations solides, et de franchir un nouveau cap pour gagner un premier titre. Mike Gillis, Lorne Hening et moi-même nous sommes impliqués. Après, l’idée de la nouvelle patinoire a grandi, par nécessité. J’ai vu que je connaissais beaucoup de personnes avec des compétences dans tous les domaines et de grands moyens. Avec aussi cette envie de développer le hockey en Europe, fortes d’expériences déjà acquises notamment outre-Atlantique. Nous avons présenté notre vision et les investisseurs aux autorités en septembre 2016. Depuis, nous avons poursuivi le travail pour développer un projet cohérent qui correspond aux besoins des Genevois et permet la viabilité à long terme du projet. Nous avons visité plusieurs arénas sportives. L’idée d’un complexe multiusage s’est imposée par ces études et le fait que notre groupe est déjà expérimenté dans l’élaboration et l’exploitation de ces arénas.»

 

L’attente avant la validation

 

Il a fallu plus de neuf mois pour que les investisseurs reçoivent enfin le feu vert qu’ils ne doutaient pas d’obtenir. «C’était long, oui, sourit Peter Gall. Je veux bien comprendre qu’il faille être patient. Une partie du travail de validation nous revenait aussi. Au final, nous n’avons pas abandonné… Le résultat de l’audit a relevé que JV Driver, l’un de nos partenaires, remplissait à lui seul tous les critères demandés. Et les autres aussi, en réalité. Il fallait peut-être ce travail de vérification en profondeur pour rassurer tout le monde, mais maintenant nous sommes impatients d’aller de l’avant.»

 

Le détail du projet au Trèfle-Blanc

 

On parle d’une nouvelle patinoire. A la vue de ce qui se prépare, c’est réducteur. Il y aura bien sûr une patinoire couverte pour accueillir Ge/Servette. Mais il y aura aussi une patinoire secondaire et des bâtiments annexes sur le front de rue.

 

«La réflexion qui a été la nôtre est simple, résume Gall. Le seul moyen de faire vivre la nouvelle patinoire, c’est de l’englober dans un complexe. La patinoire pourra accueillir 10 000 spectateurs lors des matches. En version aréna, pour les concerts et autres manifestations qui pourront s’y organiser, la capacité sera de 13 500 places. Nous avons étudié la taille critique moyenne de ce genre de salle multiusage et transformable rapidement, dans laquelle on peut voir un match de hockey le samedi soir et un concert le dimanche par exemple. Le reste sera composé de fonctions complémentaires, mais je préfère parler de lieu de rencontre, avec une place centrale et de grands bâtiments qui hébergeront plusieurs domaines d’activité.» Il est question là de bureaux, notamment pour des start-up et autres, d’une clinique médicale sportive, d’un hôtel familial, de commerces divers en vue du développement du quartier autour du PAV, de restaurants ou encore d’un sport bar.

 

Le financement

 

Au départ, il était question que l’Etat injecte 15 millions dans ce projet et la Ville 5 millions. La vision des investisseurs a évolué. «Nous avons bien compris la problématique résultant de la construction du Stade de Genève, précise l’avocat. Nous avons travaillé sur un projet pour faciliter les choses sur le plan politique. A la rentrée, nous allons proposer un financement 100% privé, autrement dit sans l’apport de fonds publics. Nous parlons là, pour tout le complexe, d’un montant d’environ 300 millions de francs. Nous possédons la surface financière, par l’intermédiaire de notre groupe d’investisseurs, ainsi que l’expérience dans ce domaine. Mais si nous avons avec nous des partenaires issus du milieu du développement et de la construction, nous travaillerons avec des entreprises locales, des ingénieurs locaux, des architectes locaux. Nous sommes là pour piloter le projet et apporter notre expertise.»

 

La viabilité du projet

 

Trop beau pour être vrai? Comment assurer la viabilité du lieu, une fois celui-ci construit, quand on estime qu’il faudra plusieurs millions par année pour l’entretien et l’amortissement? Peter Gall est sûr de lui.

 

«Comment faire pour rendre ce projet autoporteur et ne pas reproduire ce qui s’est passé avec le Stade de Genève? lance-t-il. Justement grâce au caractère multifonctionnel du complexe. Nous entendons y organiser plus d’une centaine d’événements par année. De plus, des charges annuelles seront associées au complexe dans son entier, afin de couvrir et garantir le fonctionnement de la patinoire.»

 

Le futur

 

A la rentrée, c’est ce projet qui sera présenté aux autorités. Le changement de zone est prévu pour janvier 2018. Un plan localisé de quartier doit être approuvé par le Grand Conseil et, enfin, les permis de construire pourront être délivrés. Peter Gall aimerait inaugurer la nouvelle enceinte en 2021. 2022 semble plus réaliste.

 

L’essentiel

 

Le projet Il s’agit d’un complexe multiusage, avec une patinoire de 10 000 places, qui pourrait être inauguré en 2022.

Les investisseurs Des investisseurs canadiens, un banquier privé allemand: ils sont réunis autour de Peter Gall et portent le projet.

Bon pour Ge/Servette Il est prévu que ces investisseurs dopent le budget du club dès la saison 2018-2019.

 

Les investisseurs qui portent le projet

 

Il y a d’abord eu beaucoup de mystère autour du groupe d’investisseurs. Beaucoup de fantasmes aussi. Les autorités ayant validé le sérieux de leur surface financière et de leurs compétences pour ce projet, il est temps de découvrir de qui l’on parle.

 

JV Driver C’est une entreprise diversifiée de développement, d’investissements et de construction canadienne. Son président et propriétaire est Bill Elkington. JV Driver, c’est 5000 employés et plus d’un milliard de dollars investis annuellement sur différents projets. C’est le principal investisseur du groupe. C’est cette firme qui a bâti le village olympique pour les JO 2010 de Vancouver (photo ci-dessous).

 

Dirk Hagge C’est un banquier privé allemand. Il gère notamment les fonds de la famille Quandt, important actionnaire de BMW. C’est l’autre investisseur de référence.

 

ONE Properties Une société de développement et d’investissements pancanadienne, active aussi aux Etats-Unis, notamment partenaire dans le tout nouveau projet d’arena des Edmonton Oilers.

 

Graham Lee et le groupe GSL Ce Canadien est à la tête d’une entreprise (GSL Group) présente dans plusieurs secteurs notamment dans l’hôtellerie, les bureaux, mais aussi les enceintes sportives multifonctions et autres arenas. Il est le propriétaire d’un club de juniors au sud de Vancouver, à Victoria.

 

Parmi d’autres partenaires, un important «family office» canadien On parle là d’une entreprise familiale qui possède de vastes investissements immobiliers incluant des bureaux et hôtels au Canada et qui est aussi présente à Londres. «C’est une entreprise familiale discrète, qui préfère ne pas mettre son nom en avant», explique Peter Gall.

 

Perspectives pour Ge/Servette Ces investisseurs qui vont porter le projet du Trèfle-Blanc ont tout intérêt à voir une équipe de Genève-Servette très performante sur la glace. Une équipe qui attirera du monde et qui, à tout prendre, doit jouer les premiers rôles. Est-il prévu que ces investisseurs mettent aussi la main au porte-monnaie pour doper le budget du club? «C’est drôle que vous me parliez de ça, sourit Peter Gall. Nous en avons justement discuté il y a peu. Pour cette saison, le budget est déjà bouclé. Mais on peut s’attendre à une aide ponctuelle. Après, quand la deuxième phase du projet 100% privé sera validée, oui, il est déjà prévu une augmentation substantielle du budget, sous forme de sponsoring, pour la saison 2018-2019. Si tout déroule comme prévu, cela peut aller très vite en fait.»