20 avril 2018

Didier Fischer, le président de la fondation qui s’implique dans le sport genevois, fait le point sur la mission qu’il se fixe

 

Sans elle, le Servette FC aurait sans doute connu une nouvelle faillite en 2015; sans elle, le Genève-Servette HC se serait peut-être éteint dans un vilain râle, en janvier. Elle? La Fondation 1890, une sorte de bonne fée, salvatrice des deux clubs phares du canton, détentrice désormais du capital-actions du SFC et du GSHC. Par-delà le soulagement initial, dans les deux cas, s’éveillent désormais des responsabilités que cette fondation veut assumer: ici, sur la pelouse, on parle de promotion en Super League; là, sur la glace, on évoque des moyens pour viser le titre de champion. C’est une chose d’être le sauveur, c’en est une autre de porter ces espoirs-là jusqu’au bout.

 

À la tête de cette fondation qui s’inscrit comme acteur majeur du sport genevois, il y a un conseil de fondation présidé par un homme: Didier Fischer. Il jouit de la confiance des mécènes qui dotent financièrement cette entité, capable d’effacer des dettes en un clin d’œil ou de garantir un budget pour montrer patte blanche. Faisons le point avec lui.

 

Qui sont «ses» mécènes?

 

À la question de l’identité des mécènes, toujours pas de réponse directe. «Aujourd’hui, il y a quatre mécènes qui versent de l’argent sur le compte de la Fondation 1890», explique le président. Il les connaît, bien sûr, mais ne les nommera pas, respectant ainsi leur volonté de discrétion. Nul doute que le plus grand de ces mécènes n’est autre que la Fondation Hans Wilsdorf (qui détient Rolex, notamment). Cette dernière a-t-elle fixé une route à suivre?

 

«Aucun mécène n’a de siège au conseil de la Fondation 1890, précise Didier Fischer. Il n’y a pas de diktat, ni du plus gros ni du plus petit soutien. Il y a un sérieux dans l’utilisation des moyens mis à disposition. Nous partageons la façon de penser des mécènes. Eux partagent notre façon de faire.»

 

La mission de la fondation

 

Pourquoi cette entité a-t-elle sauvé en trois ans le Servette FC et le Genève-Servette HC? Quelle est sa mission?

 

«Il y a plusieurs points, à degrés d’importance égaux, assure le président Fischer. D’abord, il y a l’idée que Genève, dans son sens large, ne devrait pas souffrir d’un déficit d’image parce que ses clubs phares seraient en mauvaise posture financière. Aujourd’hui, le sport est devenu un vecteur d’image, qu’il faut justement soigner. Ensuite, ce canton est d’une richesse phénoménale sur le plan sportif. Et le rôle du sport dans la communauté a considérablement évolué depuis dix ou quinze ans. Il est devenu, à un certain niveau, plus qu’un loisir: il peut être un métier. Le sport parle aux jeunes et la responsabilité des clubs dont on parle évolue. Nous essayons d’être garants que les structures des clubs soient au niveau de ces responsabilités. Enfin, Servette ou Genève-Servette ou le Servette Rugby appartiennent collectivement aux Genevois. Nous veillons à un devoir de bonne gouvernance et de bonne gestion.»

 

Le mode de fonctionnement

 

Comment tout s’articule dans les faits? «La Fondation 1890 fonctionne comme une holding, en détenant les actions de sociétés anonymes, souligne Fischer. Nous soutenons les personnes qui s’engagent à la tête du football, du hockey ou du rugby, mais ce sont elles qui doivent constituer les premières équipes solides et compétitives selon les objectifs qu’elles fixent, chacune pour son club, ainsi que pour les jeunes engagés dans les mouvements juniors. Bien entendu, il n’y a jamais la garantie d’atteindre tous les objectifs. On le voit avec Servette cette saison. Mais il est important d’avoir en haut de la pyramide, dans chaque club, une formation ambitieuse. Pour créer une cheminée vertueuse, avec, à la base, les jeunes. Un franc investi dans le sport pour qu’un enfant soit encadré et structuré, c’est 10 francs d’économisés en programmes sociaux. La vertu est là.»

 

Les objectifs et les moyens

 

Servette doit remonter en Super League, c’est raté pour cette saison. Genève-Servette veut pouvoir viser un titre de champion qu’il n’a encore jamais décroché. La Fondation 1890 va-t-elle accorder des moyens pharaoniques pour faciliter ces ambitions? «Les moyens de la Fondation 1890 sont limités, tranche le président. Mais elle offre des possibilités, elle aide à avoir des ambitions élevées, oui. Après, ce sont les clubs qui doivent s’organiser pour atteindre leurs objectifs. Ils doivent eux aussi générer du revenu. Avec notre soutien.»

 

Actionnariat ouvert ou fermé?

 

La Fondation 1890 possède toutes les actions des SA du Servette FC et du Genève-Servette HC. Et si un riche investisseur était désireux d’acheter tout ou partie des actions d’un des deux clubs, que se passerait-il?

 

«Rien n’est impossible, répond Didier Fischer. Cela dit, avons-nous fait tout ça pour ça? Notre volonté est de pérenniser les structures et ne pas risquer de ruiner l’immense travail fait par les éducateurs et les bénévoles dans les mouvements juniors. Si des investisseurs sont intéressés par notre projet et veulent participer, alors qu’ils le fassent via la Fondation 1890, ils sont les bienvenus. Nous accepterons leur soutien. Si la motivation, c’est seulement d’acheter des actions le temps de se lasser et de partir, c’est non. Pour le moment, il n’y a pas de volonté d’ouvrir l’actionnariat des clubs. Mais c’est la situation actuelle, je ne préjuge pas de l’avenir.»